Droit d’accès des pays en développement aux médicaments, commerce mondial et biodiversité

Isabelle HANNEQUART, Maître de Conférences en Droit public, GERCIE, Université François-Rabelais de TOURS, Colloque de Salvador de Bahia, avril 2016

Droit d’accès des Pays en développement aux médicaments, commerce mondial et biodiversité

I – Le renouvellement du droit d’accès par le corpus biodiversité

     A  –  Le renouvellement des fondements du droit d’accès

          1 – Le droit individuel d’accès aux médicaments

1a – Une composante du droit à la santé

1b – Une cible parmi les Objectifs du Millénaire pour le Développement

          2 – Le droit des Etats au partage des avantages des ressources génétiques

2a – Les dispositions de la convention Biodiversité

2b – L’application aux biomédicaments

     B – Le renouvellement des dispositifs juridiques d’accès

          1 – Le dispositif du droit d’accès au sein de l’OMC

1a – La Déclaration de Doha sur l’accord sur les ADPIC et la santé publique

1b – L’amendement à l’accord ADPIC

          2 – Le dispositif d’APA du Protocole de Nagoya

2a – Le contrat de partage des avantages

2b – Les avantages monétaires et non monétaires

 

II – Les conditions d’un véritable droit d’accès des PED aux (bio)médicaments

     A – L’absence d’un véritable droit d’accès dans les corpus du commerce et de la biodiversité

          1 – Un faux droit d’accès au sein de l’OMC

1a – Un simple droit à la régulation des flux de médicaments

1b – Des flexibilités menacées par le comportement de certains Etats

          2 – Le dispositif inadapté du Protocole de Nagoya

2a – La rémunération des ressources brutes à prélever

2b – La fin du boom technologique ?

     B –  Le développement nécessaire du droit au transfert et au partage des technologies

          1 – L’expression des responsabilités communes mais différenciées des     Etats

1a – Les transferts dans l’accord ADPIC

1b – Les transferts et partages dans le corpus biodiversité

          2 – La responsabilité sociétale des entreprises pharmaceutiques

2a – Les actions humanitaires des entreprises

2b – Vers une obligation de transfert et partage de technologie

 

La problématique juridique de l’accès des Pays en développement/PED aux médicaments devient un enjeu mondial avec la création de l’Organisation mondiale du commerce/OMC.

Avant l’entrée en vigueur de l’accord de Marrakech en 1995, les pays en développement n’ont pas l’obligation d’introduire un système de protection des brevets ; les médicaments peuvent y faire l’objet de copies et la concurrence joue entre les entreprises de produits génériques, qui d’ailleurs, dans ce cas, ne sont pas exactement des génériques, puisque les produits originaux ne sont eux-mêmes pas brevetés. Plusieurs médicaments antirétroviraux de première intention n’ont pas été initialement brevetés dans certains pays en développement comme l’Inde, qui ont développé une capacité de fabrication, et la concurrence entre eux a fait baisser le prix des traitements de première intention de 99% entre 2000 et 2010 (http://www.wipo.int/wipo_magazine/fr/2011/03/article_0005.html, magazine de l’OMPI, consulté le 16 mars 2016).

La création de l’OMC s’accompagne de l’accord ADPIC/accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce ; le commerce des médicaments en est bouleversé. Le brevet fait partie de la définition même du produit pharmaceutique selon la décision du 30 août 2003 (cf. infra), à la différence de la définition donnée par le code de la santé publique français (article L 5111-1) : « tout produit breveté, ou produit fabriqué au moyen d’un procédé breveté, du secteur pharmaceutique nécessaire pour remédier aux problèmes de santé publique tels qu’ils sont reconnus au paragraphe 1 de la Déclaration ; elle inclurait les principes actifs nécessaires à la fabrication du produit et les kits de diagnostic nécessaires à son utilisation ».

Quant au médicament générique, le droit de l’OMC n’en donne pas de définition juridique officielle, mais le site de l’organisation précise le terme, qui a deux définitions différentes (Qu’est-ce qu’un médicament générique ? http://www.who.org, consulté le 17 décembre 2016). Selon le sens commun, un médicament générique est un médicament qui ne porte pas de marque de fabrique ou de commerce. Par exemple, le “paracétamol” (qui est un ingrédient chimique entrant dans la composition de nombreux analgésiques de marque, est souvent vendu en tant que médicament générique sous son propre nom, sans marque. Il est alors “générique du point de vue de la marque de fabrique ou de commerce”. Selon le vocable de l’OMC, le terme “générique” désigne les copies de médicaments brevetés ou les médicaments dont le brevet est arrivé à expiration — c’est-à-dire les produits qui sont “génériques du point de vue du brevet”. En réalité, « ce n’est pas nécessairement différent car les médicaments brevetés sont presque toujours vendus sous une marque de fabrique ou de commerce. Lorsque des copies de médicaments brevetés sont produites par d’autres fabricants, elles sont vendues sous le nom de l’ingrédient chimique (ce qui en fait clairement des produits génériques) ou sous une autre marque (c’est-à-dire qu’il s’agit toujours de produits génériques du point de vue du brevet) ».

Cette protection vient se heurter à l’impératif de santé publique. La définition ne préjuge pas de la licéité des génériques. Avec l’accord ADPIC, en effet, la protection par le brevet est limitée dans le temps et n’est pas absolue. L’accord, au nom de la santé publique, contient des flexibilités introduites par consensus, mais au prix d’imprécisions et d’ambiguïtés, qui ont rendu difficile leur application pratique par les pays en développement. Le lancement en 2001 du cycle de Doha dédié au développement a été le moment propice pour rediscuter de l’articulation entre santé publique et commerce mondial. L’Union européenne s’est posée en médiatrice entre la thèse des PED (défense vitale de la santé publique) et celle de certains Etats développés (promotion des brevets dans le monde).

Quelques chiffres. 87% des ventes mondiales de médicaments sont réalisées dans les pays développés, alors que ceux-ci ne représentent (en 2006) que 18,7% de la population mondiale (Valérie Gateaux et Jean-Michel Heitz), Les PED sont spécifiquement touchés par les maladies tropicales qui intéressent peu les entreprises pharmaceutiques pour des raisons économiques. « Pour une vingtaine de maladies (responsable de 200 millions d’années de vie perdues et de cinq millions de morts chaque année), plus de 99% des malades sont localisés dans les pays en voie de développement. Seulement 4% des dépenses mondiales totales de Recherche et Développement et huit des 1233 médicaments autorisés entre 1975 et 1997 dans le monde leur sont consacrés (MSF 2001 et Pecoul et alii 1999, cités par Emmanuel Combe et Etienne Pfister, 2004). L’accès aux médicaments est aussi un enjeu vital pour le développement économique : les pays lourdement frappés par le sida, essentiellement des pays du Sud, connaissent une réduction de l’espérance de vie des populations et une baisse de 0,8% à 1,4% du PIB (ANRS, 2003).

L’enjeu a été renouvelé par trois facteurs, l’un d’ordre technique, l’autre d’ordre politico-économique, le troisième d’ordre juridique.

D’une part, c’est l’arrivée d’une nouvelle génération de médicaments, les biomédicaments. Ceux-ci « regroupent diverses classes de médicaments dont le point commun est de faire appel à une source biologique comme matière première du principe actif qu’ils renferment », à la différence des médicaments dont le principe actif est issu de la synthèse chimique et qui restent les médicaments les plus représentés dans la pharmacopée actuelle (90% en 2007). Le recours au vivant, notamment aux ressources du règne animal, pour traiter les maladies n’est pas nouveau, comme le montrent les antibiotiques (issus de substances extraites des micro-organismes), mais les biotechnologies modernes ont permis, à partir des années 70, à l’industrie pharmaceutique de développer une véritable ingénierie du vivant et une bioproduction de plus en plus sophistiquée. Les vaccins, par exemple, sont des biomédicaments.

Et il existe désormais les génériques des biomédicaments, les biosimilaires. Sur le plan pharmacologique, compte tenu de la complexité physicochimique et de la technicité élevée des originaux, les génériques ne peuvent être identiques (ou bioéquivalents) et ne sont donc que similaires (http://www.leem.org (les entreprises du médicament).

D’autre part, c’est la montée en puissance, à partir des années 2000, des pays émergents et des entreprises pharmaceutiques émergentes. (Le terme de BRIC apparaît en 2001 et l’Afrique du Sud rejoint le groupe en 2011). En 1992, la moitié de la production de médicaments des PED est réalisée par 7 Etats : Argentine, Brésil, Inde, Iran, Mexique et Corée du Sud (ONUDI, 1992). L’Inde fait figure de modèle pour les PED ; elle a adopté « une posture sanito-industrielle » offensive en soutenant « le développement d’une industrie pharmaceutique domestique performante, capable de fournir des médicaments plus abordables aux populations » (Samira Guennif, 2007) et en devenant une puissance exportatrice de médicaments. En Afrique, le Sénégal fait figure de modèle pour avoir proposé un accès aux antirétroviraux à travers un programme public lancé en 1998.

Troisièmement, depuis 1992, s’est développé un corpus biodiversité qui rompt avec la logique classique du marché et poursuit des objectifs éthiques : conservation de la diversité biologique, utilisation durable de ses éléments, et « partage juste et équitable des avantages découlant de l’exploitation des ressources génétiques, notamment grâce à un accès satisfaisant aux ressources génétiques et à un transfert approprié des techniques pertinentes, compte tenu de tous les droits sur ces ressources et techniques, et grâce à un financement adéquat » (convention sur la diversité biologique, article premier – Objectifs).

Les rapports de force ont donc évolué en faveur du droit d’accès aux médicaments. L’OMC, après s’être ouverte à la préoccupation de l’environnement (par l’inscription du développement durable dans le préambule de l’accord de Marrakech), en est arrivée à reconnaître un droit d’accès des PED aux médicaments. Le corpus biodiversité, qui est susceptible de s’appliquer aux biomédicaments, est venu renouveler la problématique de l’accès aux médicaments (I).

Cependant, les deux corpus du commerce mondial et de la biodiversité, non seulement restent séparés (et on sait que les Etats-Unis, membres de l’OMC, n’ont pas ratifié la convention sur la diversité biologique), mais ne sont pas adaptés aux besoins des PED d’accéder aux médicaments et aux biomédicaments, au point de parler d’un droit d’accès en trompe l’œil. On se demandera alors quelles seraient les conditions juridiques d’un véritable droit d’accès aux (bio)médicaments (II).

I – Le renouvellement du droit d’accès par le corpus biodiversité

Le corpus biodiversité renouvelle les fondements du droit d’accès ainsi que les dispositifs mis en œuvre pour accéder directement ou indirectement aux médicaments.

A – Le renouvellement des fondements du droit d’accès

Le droit d’accès aux médicaments serait un droit des Etats. Il peut s’appuyer sur les droits humains, notamment sur le droit individuel d’accès aux médicaments. Il peut aussi être dégagé de la Convention relative à la biodiversité.

1 – Le droit individuel d’accès aux médicaments

Ce droit est une composante du droit à la santé et une cible parmi les Objectifs du Millénaire pour le développement/OMD.

1a – Une composante du droit à la santé

Le droit d’accès découle du droit à la santé. Ce droit figure dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (adopté le 16 décembre 1966 et entré en vigueur le 3 janvier 1976), ainsi que dans la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1979) et dans la Convention relative aux droits de l’enfant (1989).

Dans son article 12 §1, le Pacte dispose que les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu’elle soit capable d’atteindre. Dans le §2, il ajoute que les mesures que les États parties prendront en vue d’assurer le plein exercice du droit à la santé devront comprendre les mesures nécessaires pour assurer la diminution de la mortinatalité et de la mortalité infantile, ainsi que le développement sain de l’enfant, l’amélioration de tous les aspects de l’hygiène du milieu et de l’hygiène industrielle, la prophylaxie et le traitement des maladies épidémiques, endémiques, professionnelles et autres, ainsi que la lutte contre ces maladies, la création de conditions propres à assurer à tous des services médicaux et une aide médicale en cas de maladie.

Le droit à la santé est donc un droit à un niveau de santé le plus élevé possible, compte tenu des progrès de la médecine, des conditions économiques que les Etats ont l’obligation de mettre en place au niveau national pour le plein exercice de ce droit, et compte tenu de la coopération internationale.

Dans la seconde moitié des années 1990, l’Organisation mondiale de la santé a intégré les droits humains dans ses travaux en considérant que l’accès aux médicaments faisait partie du droit à la santé. Cela vise les médicaments en général et en particulier un noyau dur de médicaments, les « médicaments essentiels » qui sont l’objet de son programme d’action pour les médicaments essentiels.

En 2000, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a déclaré que l’accès aux médicaments essentiels était un élément fondamental du droit à la santé (Observation générale n°14, Le droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint, 2000, E/C.12/2000/4, par. 4, ce droit implique les principes d’accessibilité, de disponibilité, d’adéquation et de qualité assurée des biens et services). Il s’appuyait sur plusieurs résolutions de la Sous-Commission et de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies (Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l’homme, La mondialisation et ses effets sur la pleine jouissance de tous les droits de l’homme, 2001, E/CN. 4/sub.2/Res/2001/5). En 2001, l’Assemblée générale des Nations Unies (Déclaration d’engagement sur le VIH/sida, 2001, A/RES/S-26/2, par.15) et l’Assemblée Mondiale de la Santé ont soutenu elles-mêmes cette position (Stratégie pharmaceutique de l’OMS (WHA 54.11).

L’OMS a fait une intervention à la quatrième Conférence ministérielle de l’OMC (qui a adopté la Déclaration de Doha sur l’Accord sur les ADPIC et la santé publique), dans laquelle elle a affirmé que « l’accès aux soins est un droit universel […] [qui] implique l’accès aux services de santé, à la prévention, aux soins, aux traitements, au soutien et, bien-sûr, aux médicaments indispensables » (Déclaration de l’OMS à la Conférence ministérielle de l’OMC, Doha (Qatar), 2001).

A partir 2002, c’est l’accès aux services de santé considéré comme un droit humain qui a fait l’objet de travaux approfondis et le rapport annuel de 2003 du Département Médicaments essentiels fait explicitement référence à l’accès aux médicaments comme un droit humain. Avec la stratégie 2004-2007 du Département Médicaments essentiels, la promotion de l’accès aux médicaments en tant que droit humain est devenue un nouveau domaine d’activité.

L’accès aux médicaments essentiels se retrouve dans les constitutions nationales ; cette inscription fait figure d’indicateur de progrès réel car elle offre un fondement juridique efficace lors des procès. L’OMS a réalisé une étude sur cet indicateur (Medium-term strategic plan 2008–2013. Geneva: World Health Organization; 2007:87) qui montre que 135 constitutions nationales sur 186 contiennent des dispositions relatives à la santé ou au droit à la santé, que quatre constitutions, celles du Mexique, du Panama, des Philippines et de la République arabe syrienne, mentionnent expressément l’accès universel aux médicaments et que d’autres constitutions décrivent l’accès en termes plus généraux (comme l’Afrique du Sud, Cuba ou le Nicaragua). Certaines constitutions ciblent les populations pauvres et défavorisées (par exemple, au Nicaragua, aux Philippines, au Vietnam).

L’intégration des traités internationaux dans le droit national (dans 31 Etats) est une autre voie pour invoquer le droit à la santé, qui suppose que le juge national reconnaisse son applicabilité directe.

Le droit aux médicaments comme droit de l’homme est donc bien établi et peut être renforcé, de façon complémentaire, par le droit à la vie (article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques).

1b – Une cible parmi les Objectifs du Millénaire pour le Développement

La santé occupe une place très importante dans les huit OMD des Nations Unies, que les Etats membres devaient s’efforcer de réaliser entre 2000 et 2015. Plusieurs OMD concernent directement la santé.  L’OMS souligne les principaux faits suivants, qui sont des avancées significatives dans ce domaine, malgré le retard des Etats fortement touchés par le VIH/sida, des difficultés économiques ou des conflits :

« À l’échelle mondiale, le nombre de décès d’enfants de moins de cinq ans a chuté de 12,7 millions en 1990 à 6,3 millions en 2013.

Dans les pays en développement, le pourcentage d’enfants de moins de cinq ans présentant un déficit pondéral, a régressé de 28% en 1990 à 17% en 2013.

Au niveau mondial, le nombre de nouvelles infections par le VIH a régressé de 38% entre 2001 et 2013.

Le nombre de cas existants de tuberculose est en baisse, de même que la mortalité parmi les cas de tuberculose négatifs pour le VIH.

En 2010, l’objectif du Millénaire pour le développement concernant l’accès à l’eau potable, mesuré au moyen d’un indicateur de l’accès à des sources d’eau de boisson améliorées, a été atteint au niveau mondial mais il reste beaucoup à faire pour atteindre la cible en matière d’assainissement ».

 

L’OMS a rendu un rapport de situation sur les OMD liés à la santé (OMS, Aide-mémoire N°290, Mai 2015), à savoir les OMD 1, 4, 5, 6, 7 et 8, soit 6 OMD sur 8, qui contiennent des cibles dans le domaine de la santé :

 

« Objectif du Millénaire pour le développement 1: éradiquer l’extrême pauvreté et la faim

Cible 1.C: réduire de moitié, entre 1990 et 2015, la proportion de la population qui souffre de la faim

On estime que la dénutrition, qui comprend le retard de croissance fœtale, le retard de croissance, l’émaciation et les carences en vitamine A et en zinc, ainsi que l’allaitement au sein insuffisant, est la cause principale de 45% des décès d’enfants de moins de cinq ans.

Le pourcentage d’enfants présentant un déficit pondéral dans les pays en développement a régressé de 28% à 17% entre 1990 et 2013. Le rythme des progrès est proche de celui nécessaire pour atteindre la cible d’OMD, néanmoins les améliorations sont irrégulièrement réparties entre les différentes régions et à l’intérieur de celles-ci.

 

Objectif du Millénaire pour le développement 4: réduire la mortalité infantile

Cible 4.A: réduire des deux-tiers, entre 1990 et 2015, le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans

À l’échelle mondiale, des progrès importants ont été obtenus dans la réduction de la mortalité des enfants de moins de cinq ans. En 2013, 6,3 millions d’enfants de moins de cinq ans sont morts, contre 12,7 millions en 1990. Entre 1990 et 2013, la mortalité des moins de cinq ans a baissé de 49%, soit une diminution du taux de mortalité estimé de 90 à 46 décès pour 1000 naissances vivantes.

Le rythme mondial de cette baisse s’est aussi accéléré au cours des dernières années – passant de 1,2% par an sur la période 1990-1995 à 4% pendant les années 2005-2013. Malgré cette amélioration, il est peu probable que le monde atteigne la cible d’OMD consistant à réduire des deux tiers les taux de mortalité entre 1990 et 2015.

Davantage de pays obtiennent maintenant des taux de couverture vaccinale élevés; en 2013, 66% des États Membres avaient atteint un taux de couverture de 90% au moins. En 2013, la couverture mondiale par la vaccination antirougeoleuse était de 84% chez les enfants de 12 à 23 mois. Entre 2000 et 2013, le nombre estimé de décès dus à la rougeole a diminué de 74%, et a été ramené de 481 000 à 124 000.

 

Objectif du Millénaire pour le développement 5: améliorer la santé maternelle

Cible 5.A: réduire de trois quarts, entre 1990 et 2015, le taux de mortalité maternelle

Cible 5.B: rendre l’accès à la médecine procréative universel d’ici à 2015

Malgré une baisse importante du nombre de décès maternels – passé selon les estimations de 523 000 en 1990 à 289 000 en 2013 – le rythme de baisse est à peine de moitié de celui qui serait nécessaire pour atteindre la cible d’OMD consistant à réduire de trois quarts le ratio de mortalité maternelle entre 1990 et 2015.

Pour que la mortalité maternelle diminue, il faut que les femmes aient accès à des soins de qualité et à des interventions efficaces dans le domaine de la santé génésique. En 2012, 64% des femmes de 15 à 49 ans mariées ou vivant en union consensuelle utilisaient une forme de contraception, tandis que 12% de celles souhaitant ne plus avoir d’enfants ou différer la prochaine grossesse ne bénéficiaient d’aucune contraception.

Le pourcentage de femmes ayant bénéficié de soins anténatals au moins une fois pendant leur grossesse était de 83% environ sur la période 2007-2014, mais le pourcentage de celles ayant bénéficié de quatre visites anténatales ou plus (soit le nombre minimum recommandé) chutait en revanche à 64% environ.

 

Le pourcentage de naissances assistées par du personnel médical qualifié – paramètre déterminant dans la réduction de la mortalité périnatale, néonatale et maternelle – est supérieure à 90% dans trois des six régions de l’OMS. Une augmentation de cette couverture est néanmoins nécessaire dans certaines régions comme la région africaine où le taux reste inférieur à 51%.

Objectif du Millénaire pour le développement 6: combattre le VIH/sida, le paludisme et d’autres maladies

Cible 6A: d’ici 2015, avoir enrayé la propagation du VIH/sida et commencer à inverser la tendance actuelle

Cible 6B: d’ici 2010, assurer à tous ceux qui en ont besoin l’accès au traitement contre le VIH/sida

 

Selon les estimations, 2,1 millions de personnes ont été infectées par le VIH en 2013 – contre 3,4 millions en 2001. À la fin de 2013, environ 12,9 millions de personnes suivaient une thérapie antirétrovirale à l’échelle mondiale. Sur ce nombre, 11,7 millions vivaient dans des pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire et représentaient 36 % des 32,6 millions de personnes, selon les estimations, vivant avec le VIH dans ces pays.

Si les tendances actuelles se maintiennent, la cible consistant à faire bénéficier 15 millions de personnes d’une thérapie antirétrovirale d’ici à 2015 sera dépassée.

La baisse du nombre de personnes nouvellement infectées ainsi que la meilleure disponibilité de la thérapie antirétrovirale ont contribué au fort recul du nombre de décès dus au VIH – qui, selon les estimations, serait passé de 2,4 millions de personnes en 2005 à 1,5 million de personnes en 2013. Le nombre de personnes décédant de causes liées au sida étant moindre, il est probable que le nombre de patients vivant avec le VIH continuera d’augmenter.

Cible 6C: d’ici à 2015, avoir maîtrisé le paludisme et d’autres maladies graves et commencer à inverser la tendance actuelle

 

Paludisme

Près de la moitié de la population mondiale est exposée au risque de paludisme et sur les 198 millions de cas estimés en 2013, l’on a enregistré environ 584 000 décès– pour la plupart des enfants de moins de cinq ans vivant en Afrique.

Pendant la période 2000-2013, l’incidence du paludisme et les taux de mortalité de la population exposée ont diminué à l’échelle mondiale, de 30% et 47% respectivement.

La couverture par des interventions telles que la distribution de moustiquaires imprégnées d’insecticide et les pulvérisations intradomiciliaires d’insecticides à effet rémanent doit être maintenue pour prévenir la résurgence de la morbidité et de la mortalité dues au paludisme. Au niveau mondial, la cible des objectifs du Millénaire pour le développement, qui consistait d’ici à 2015 à maîtriser le paludisme et commencer à inverser la tendance actuelle a déjà été atteinte.

 

Tuberculose

Le nombre annuel de nouveaux cas de tuberculose dans le monde diminue lentement depuis une décennie, et l’OMD 6.C a donc été atteint pour ce qui est d’inverser la tendance d’ici à 2015. En 2013, on estimait à 8,9 millions le nombre de nouveaux cas de tuberculose, dont 1,5 million de décès (parmi lesquels 360 000 de personnes VIH-positives).

À l’échelle mondiale, les taux de succès thérapeutique se sont maintenus à des niveaux élevés supérieurs ou égaux à la valeur cible de 85% depuis 2007. Néanmoins, la tuberculose multirésistante (tuberculose MR), apparue principalement en raison d’un traitement inadéquat, continue de poser problème.

Autres maladies

La cible 6 des OMD englobe également les maladies tropicales négligées, un groupe de maladies infectieuses très diverses d’un point de vue médical, causées par toute une série d’agents pathogènes.

En 2013, seuls 6314 cas de trypanosomiase humaine africaine ont été notifiés, soit les chiffres les plus bas en 50 ans. On cherche désormais à atteindre la cible visant à éliminer le problème de santé publique que représente cette maladie d’ici à 2020. La dracunculose est également sur le point d’être éradiquée, avec 126 cas notifiés en 2014 – nombre qui n’a jamais été aussi bas – et une cible de l’OMS visant à en interrompre la transmission d’ici à la fin de 2015.

 

Des plans visant à éliminer la lèpre en tant que problème de santé publique à l’échelle mondiale d’ici à 2020 ont également été élaborés et sont en cours d’application. L’élimination de la leishmaniose viscérale en tant que problème de santé publique sur le sous-continent indien d’ici à 2020 est en bonne voie, le nombre de cas incidents enregistrés depuis le lancement du programme en 2005 ayant baissé de plus de 75%.

Pour ce qui est de la filariose lymphatique, plus de 5 milliards de traitement ont été administrés depuis 2000 pour arrêter sa propagation et, sur les 73 pays d’endémie connus, 39 sont en bonne voie pour éliminer ce problème de santé publique d’ici à 2020.

 

Objectif du Millénaire pour le développement 7: assurer un environnement durable

Cible 7C: réduire de moitié d’ici 2015 le pourcentage de la population qui n’a pas accès de façon durable à un approvisionnement en eau potable et à un système d’assainissement de base

Le monde a maintenant atteint la cible d’OMD relative à l’accès à une eau de boisson sans risque sanitaire. En 2012, 90% de la population utilisait une source de boisson améliorée alors que ce chiffre n’était que de 76% en 1990. Les progrès ne sont cependant pas homogènes entre les différentes régions, entre les zones rurales ou urbaines, riches ou pauvres.

Concernant l’assainissement de base, les taux actuels de progression sont trop faibles pour que la cible d’OMD soit atteinte à l’échelle mondiale. En 2012, 2,5 milliards de personnes n’avaient pas accès à des installations d’assainissement améliorées dont près d’un milliard continuent à déféquer à ciel ouvert. Le nombre de personnes vivant dans des zones urbaines et privées d’accès à un assainissement amélioré est en augmentation en raison du développement démographique rapide de ces zones. »

L’OMD 8, dans sa cible E, concerne spécifiquement l’accès aux médicaments des PED en coopération avec l’industrie pharmaceutique.

 

« Objectif du Millénaire pour le développement 8 : mettre en place un partenariat mondial pour le développement

Cible 8E. En coopération avec l’industrie pharmaceutique, rendre les médicaments essentiels disponibles et abordables dans les pays en développement

De nombreuses personnes sont confrontées à la rareté des médicaments dans le secteur public, ce qui les contraint à s’adresser au secteur privé, dont les prix peuvent être substantiellement plus élevés. Les enquêtes menées entre 2007 et 2013 montrent que la disponibilité d’une sélection de médicaments génériques n’était en moyenne que de 55% dans l21 pays à revenu faible ou intermédiaire.

En conséquence, même les génériques les moins onéreux peuvent mettre des traitements courants hors de portée des ménages à faible revenu dans les pays en développement. Le prix le plus élevé est payé par les malades souffrant de maladies chroniques. Il existe des traitements efficaces pour la majorité des pathologies chroniques que l’on rencontre dans le monde, mais l’accès universel à ces traitements reste impossible ».

Le contraste est notable entre cette dernière cible et les cibles précédentes. Des progrès sont mesurables concernant le recul de la mortalité et de maladies touchant sévèrement les PED, comme le sida ou le paludisme, mais, en même temps, l’accès aux médicaments génériques n’est pas assuré. Cela signifie que le plus souvent les résultats ont été obtenus sans le recours (légal ou illégal) aux génériques. Ils ont été obtenus par des programmes de santé nationaux ou internationaux utilisant des médicaments vendus au prix fort ou bien objet de dons humanitaires de la part des entreprises pharmaceutiques (ce qui se vérifie parfois, mais qui n’assure pas un droit d’accès aux médicaments) ou obtenus grâce à quelques entreprises capables d’inventer et fabriquer des médicaments princeps (originaux).

Les nouveaux objectifs de développement durable/ODD ont pris le relais en 2015. Parmi les 17 ODD, la santé figure dans l’objectif 3 Permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge. La problématique de l’accès aux médicaments figure en bonne place et l’objectif mentionne explicitement la Déclaration de Doha adoptée en 2001, juste après le lancement des OMD, déclaration qui constitue le point de départ de la reconnaissance du droit d ‘accès aux médicaments :

« D’ici à 2030, réduire nettement le nombre de décès et de maladies dus à des substances chimiques dangereuses et à la pollution et à la contamination de l’air, de l’eau et du sol

◦Renforcer dans tous les pays, selon qu’il convient, l’application de la Convention-cadre de l’Organisation mondiale de la Santé pour la lutte antitabac

◦Appuyer la recherche et la mise au point de vaccins et de médicaments contre les maladies, transmissibles ou non, qui touchent principalement les habitants des pays en développement, donner accès, à un coût abordable, à des médicaments et vaccins essentiels, conformément à la Déclaration de Doha sur l’Accord sur les ADPIC et la santé publique, qui réaffirme le droit qu’ont les pays en développement, pour protéger la santé publique et, en particulier, assurer l’accès universel aux médicaments, de recourir pleinement aux dispositions de l’Accord sur les ADPIC qui ménagent une flexibilité à cet effet

◦Accroître considérablement le budget de la santé et le recrutement, le perfectionnement, la formation et le maintien en poste du personnel de santé dans les pays en développement, notamment dans les pays les moins avancés et les petits États insulaires en développement

◦Renforcer les moyens dont disposent tous les pays, en particulier les pays en développement, en matière d’alerte rapide, de réduction des risques et de gestion des risques sanitaires nationaux et mondiaux ».

Le droit au partage des avantages issu de la convention biodiversité peut-il faciliter cet accès ?

 

2 – Le droit au partage des avantages des ressources génétiques

 

Ce droit des Etats est reconnu par la convention sur la diversité biologique, qui est susceptible, sans les viser explicitement, de s’appliquer aux biomédicaments.

2a – Les dispositions de la convention BD

La Convention relative à la diversité biologique de 1992 concilie la souveraineté des Etats sur leurs ressources naturelles, génétiques, avec le droit d’accès des autres Etats grâce au principe du consentement préalable donné en connaissance de cause et à des conditions d’exploitation convenues d’un commun accord, qui doivent assurer le partage juste et équitable.

L’article 15§7 dispose que « Chaque Partie contractante prend les mesures législatives,             administratives ou de politique générale appropriées… pour assurer le partage juste et équitable des résultats de la recherche et de la mise en valeur ainsi que des avantages résultant de l’utilisation commerciale et autre des ressources génétiques de la Partie contractante qui fournit ces éléments… ».

L’article 15 renvoie de façon un peu redondante à deux articles, l’article 16 sur l’accès à la technologie et aux transferts de technologie, et l’article 19 – Gestion de la biotechnologie et répartition de ses avantages – sur la participation conjointe aux activités de recherche et l’accès prioritaire aux résultats et aux avantages découlant des biotechnologies, la biotechnologie étant définie à l’article 2 comme toute application technologique qui utilise des systèmes biologiques, des organismes vivants, ou des dérivés de ceux-ci, pour réaliser ou modifier des produits ou des procédés à usage spécifique.

Selon l’article 19§1, « Chaque  Partie contractante prend les mesures législatives, administratives ou de politique voulues pour assurer la participation effective aux activités de recherche biotechnologique des Parties contractantes, en particulier les pays en développement, qui fournissent les ressources génétiques pour ces activités de recherche, si possible dans ces Parties contractantes ».

Selon l’article 19§2, « Chaque Partie contractante prend toutes les mesures possibles pour encourager et favoriser l’accès prioritaire, sur une base juste et équitable, des Parties contractantes, en particulier des pays en développement, aux résultats et aux avantages découlant des biotechnologies fondées sur les ressources génétiques fournies par ces Parties. Cet accès se fait à des conditions convenues d’un commun accord ».

Il ne s’agit plus d’un droit humain, mais d’un droit international des Etats, notamment des Etats mégadivers, qui vise à donner des garanties à ces Etats vis-à-vis des autres Etats et des entreprises, notamment pharmaceutiques.

2b – L’application aux biomédicaments

 

Le lien entre biodiversité et médicament est ancien mais lui-même renouvelé par la recherche scientifique actuelle.

« Les plantes sont à la source de l’industrie pharmaceutique. La morphine, principal remède contre la douleur, est extraite du pavot ; la quinine, utilisée comme antipaludique, provient des quinquinas ; l’aspirine, elle, trouve son origine dans le saule blanc ou la reine-des-prés. « L’industrie pharmaceutique naît au XIXe siècle à partir des plantes, relève Jacques Fleurentin, président de la Société française d’ethnopharmacologie. Il y a d’un côté les plantes médicinales, qui forment déjà le fonds de toute la médecine traditionnelle, et de l’autre, les plantes toxiques, qui intéressent tout particulièrement la chimie. La digitale, par exemple, est un poison pour le cœur, mais isolée chimiquement et à très faible dose, sa substance active peut aussi le soigner : de cardiotoxique, elle devient alors cardiotonique. »

En 2006, près du quart des 508 milliards d’euros du marché pharmaceutique provenait en partie au moins de substances naturelles, selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

Chez Pierre Fabre, en pointe dans ces recherches, environ 35 % du chiffre d’affaires vient des plantes, d’après Bruno David, directeur des approvisionnements et de la botanique du laboratoire pharmaceutique. Celui-ci commercialise depuis 1989 un médicament majeur dans la lutte contre le cancer du sein et du poumon, dont le principe actif est issu de la pervenche de Madagascar ».

(http://www.lemonde.fr/planete/visuel/2014/10/11/de-la-plante-au-medicament_4504158_3244.html#qvVq5SZiLLYOu7Im.99, consulté le 24 février 2016).

 

Le doute vient du décalage entre ressources biologiques et ressources génétiques, entre le titre de la convention et le champ de cette convention ! Il n’est pas sûr que le champ de ce corpus englobe l’ensemble des biomédicaments. Ce champ peut sembler restrictif puisqu’il concerne les ressources génétiques et non les ressources biologiques, dont la définition est plus large, même si le protocole étend le champ d’application à tout dérivé des ressources génétiques (tout composé biochimique qui existe à l’état naturel résultant de l’expression génétique ou du métabolisme de ressources biologiques ou génétiques, même s’il ne contient pas d’unités fonctionnelles de l’hérédité, article 2 du Protocole). En effet, les ressources biologiques sont définies comme « les ressources génétiques, les organismes ou éléments de ceux-ci, les populations, ou tout autre élément biotique des écosystèmes ayant une utilisation ou une valeur effective ou potentielle pour l’humanité » – le vivant de l’environnement humain -, les ressources génétiques désignant le matériel génétique (« matériel d’origine végétale, animale, microbienne ou autre, contenant des unités fonctionnelles de l’hérédité ») ayant « une valeur effective ou potentielle » – l’hérédité.

Le corpus juridique viserait-il les ressources de la biodiversité seulement en cas d’utilisation spécifique des gènes voire en cas de modification génétique (comme c’est le cas pour le protocole sur la biosécurité qui concerne les OGM) ? Un tel argument ne devrait pas être invoqué pour échapper aux contraintes du corpus car la définition des ressources génétiques ne contient aucune restriction de cet ordre et toute utilisation d’une ressource biologique, une plante par exemple, implique nécessairement l’utilisation du matériel génétique, qui donne à la ressource biologique ses propriétés spécifiques (de lutter contre le cancer par exemple). Tous les biomédicaments issus de la biodiversité naturelle sont en ce sens issus des ressources génétiques, même si certains d’entre eux sont issus de modifications génétiques (Par exemple, les anticorps monoclonaux, qui permettent d’affronter certains cancers, sont produits par des cellules d’origine animale transgéniques). La protection du protocole s’applique donc quelle que soit l’utilisation subséquente des ressources génétiques prélévées.

Notons que le corpus biodiversité concerne les ressources issues de l’environnement naturel de l’être humain mais pas celles issues du corps humain. Sur ce sujet, la Conférence générale de l’Unesco a adopté, le 11 novembre 1997, à l’unanimité, la Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l’homme, reprise l’année suivante par l’Assemblée générale des Nations Unies (résolution AIRES/53/152 du 9 décembre 1998). La déclaration vise à encadrer les recherches sur le génome humain du point de vue éthique. Selon l’article 12, (a) Chacun doit avoir accès aux progrès de la biologie, de la génétique et de la médecine concernant le génome humain, dans le respect de sa dignité et de ses droits, (b) La liberté de la recherche, qui est nécessaire au progrès de la connaissance, procède de la liberté de pensée. Les applications de la recherche, notamment celles en biologie, en génétique et en médecine, concernant le génome humain, doivent tendre à l’allégement de la souffrance et à l’amélioration de la santé de l’individu et de l’humanité tout entière. Les biomédicaments peuvent provenir de ressources génétiques d’origine humaine. Les thérapies géniques ou cellulaires utilisent un matériel issu du corps humain.

B – Le renouvellement des dispositifs juridiques d’accès

Le droit de l’OMC a progressivement intégré un dispositif d’accès, auquel l faut maintenant ajouter le dispositif d’APA du Protocole de Nagoya.

1 – Le dispositif du droit d’accès au sein de l’OMC

1a – Déclaration de Doha sur l’accord sur les ADPIC et la santé publique du 14 novembre 2001

A la création de l’OMC, l’accord ADPIC a adopté la logique traditionnelle, protectrice des inventions. Les membres de l’OMC doivent offrir la protection du brevet (pour une période d’au moins vingt ans à partir du dépôt de la demande de brevet) pour toute invention, qu’il s’agisse d’un produit comme le médicament ou d’un procédé comme la méthode de production des ingrédients chimiques entrant dans la composition du médicament. L’accord autorise certaines exceptions. Mais certains Etats ne voyaient pas clairement comment les flexibilités seraient interprétées et dans quelle mesure leur droit d’y recourir serait respecté. Le Groupe africain (qui réunit tous les Membres africains de l’OMC), en particulier, demandait une clarification.

Il existe différents sortes de flexibilités dans l’accord :

  • Pour la recherche, les Etats peuvent autoriser les chercheurs à utiliser une invention brevetée pour mieux comprendre l’invention et faire progresser la science et la technologie
  • Les Etats peuvent autoriser les fabricants de médicaments génériques à anticiper, c’est-à-dire à utiliser l’invention brevetée pour obtenir l’approbation de commercialisation sans l’autorisation du titulaire du brevet et avant l’expiration de la protection, pour être à même de commercialiser dès que le brevet arrive à expiration (exception réglementaire ou disposition « Bolar »),
  • Les Etats peuvent aussi intervenir pour empêcher les titulaires de brevets de faire un usage abusif de leurs droits, de restreindre « de manière déraisonnable » le commerce ou de faire obstacle au transfert international de technologie.

L’article 31 de l’accord ADPIC prévoit d’«autres utilisations sans autorisation du détenteur de droits »… pour l’approvisionnement du marché intérieur (f) avec une rémunération adéquate du détenteur de droits (h). Cet article a des répercussions importantes sur l’accès aux médicaments, en laissant des marges de manœuvre aux Etats pour délivrer des licences obligatoires (l’article vise aussi les utilisations par les pouvoirs publics pour leurs propres besoins). Mais l’article ne mentionne pas explicitement les licences obligatoires.

Lors des négociations du cycle d’Uruguay, certains négociateurs des PED avaient pointé du doigt la question des liens entre l’accord ADPIC, la santé et les médicaments et ce sujet a fait l’objet de réflexions à la fin du cycle de l’Uruguay. La CNUCED a publié une étude peu après l’adoption du texte et l’OMS a présenté en 1995 un document qui analyse les possibles incidences de l’accord sur l’accès aux médicaments et met en garde le secteur de la santé. En 1996, l’Assemblée mondiale de la santé donne mandat au Secrétariat de l’OMC pour poursuivre les travaux sur le sujet.

La Conférence ministérielle de Doha de novembre 2001 apporte une première réponse. La Communauté européenne y joue « un rôle moteur », « en se posant notamment comme médiateur entre les PED et certains pays industrialisés au sein de l’OMC » (Accès aux médicaments : la vraie histoire, le point des négociations, Commission européenne, 5 juin 2002, http://trade.ec.europa.eu). Les Etats adoptent la déclaration sur l’Accord sur les ADPIC et la santé publique. Ils reconnaissent, face à la gravité des problèmes de santé publique touchant de nombreux PED, la nécessité d’interpréter l’accord d’une manière favorable à la santé publique en encourageant l’accès aux médicaments et ils réaffirment le droit des Etats membres de recourir pleinement aux flexibilités (paragraphe 4). En conséquence de quoi, ils précisent que « chaque Etat membre a le droit d’accorder des licences obligatoires/LO et la liberté de déterminer les motifs pour lesquels de telles licences sont accordées (paragraphe 5b).

La déclaration autorise donc les PED à copier les médicaments existants dans le cadre de ces licences obligatoires. Selon une LO, les pouvoirs publics autorisent un tiers à fabriquer le produit breveté (ou à l’utiliser) sans le consentement du titulaire du brevet, sous réserve d’une rémunération (le plus souvent, le titulaire reçoit un pourcentage sur le prix de vente du générique). Une copie générique est fabriquée, mais le détenteur conserve les droits sur le brevet, y compris le droit à rémunération pour les copies autorisées. A la différence de la licence volontaire, qui est vendue ou donnée librement par une entreprise. L’accord n’énumère pas les raisons qui peuvent justifier les LO et la déclaration confirme que les Etats sont libres de déterminer les motifs.

Mais l’article 31 réglemente cette possibilité. « Une telle utilisation pourra n’être permise que si, avant cette utilisation, le candidat utilisateur s’est efforcé d’obtenir l’autorisation du détenteur du droit, suivant des conditions et modalités commerciales raisonnables, et que si ses efforts n’ont pas abouti dans un délai raisonnable. Un Membre pourra déroger à cette prescription dans des situations d’urgence nationale ou d’autres circonstances d’extrême urgence ou en cas d’utilisation publique à des fins non commerciales.  Dans des situations d’urgence nationale ou d’autres circonstances d’extrême urgence, le détenteur du droit en sera néanmoins avisé aussitôt qu’il sera raisonnablement possible » (b) et « la portée et la durée d’une telle utilisation seront limitées aux fins auxquelles celle-ci a été autorisée » (c). La déclaration ajoute alors que chaque membre est compétent pour déterminer ce qui constitue une telle situation d’urgence nationale, tout en soulignant que les crises liées au SIDA, au paludisme ou à d’autres épidémies, peuvent représenter une telle situation (5c). Dans cette hypothèse, les PED ne sont donc soumis qu’à une obligation d’information des détenteurs de brevets dans un délai raisonnable, obligation à laquelle il faut ajouter l’obligation d’une rémunération adéquate.

Enfin, la déclaration rappelle que les Etats sont libres de définir leur propre régime en ce qui concerne l’épuisement des droits, régime d’exhaustivité nationale ou internationale. Le second permet à un Etat de procéder à des importations parallèles, c’est-à-dire d’importer un médicament depuis un pays où il est commercialisé à un prix inférieur.

Mais cette avancée ne bénéficie qu’aux Etats qui ont des capacités économiques. La déclaration, dans son §6, appelle à une solution rapide au problème posé par les difficultés des Etats membres qui n’ont pas des capacités de fabrication suffisantes dans le secteur pharmaceutique et qui ne peuvent pas recourir de manière effective aux LO et qui donc doivent avoir recours au commerce international. Les Etats donnent instruction au Conseil des ADPIC de trouver une solution rapide et de faire rapport au Conseil général de l’OMC avant la fin de 2002.

1b – L’amendement à l’accord ADPIC

Une nouvelle étape a été franchie avec la décision, adoptée par consensus, du Conseil général de l’OMC en date du 30 août 2003, décision de « Mise en œuvre du §6 de la Déclaration de Doha sur l’accord sur les ADPIC et la santé publique. La décision de 2003 porte dérogation à l’ADPIC : elle note qu’« il existe des circonstances exceptionnelles justifiant des dérogations aux obligations énoncées aux § f) et h) » et invente un système d’entente entre un Etat exportateur et un Etat importateur.

Il est dérogé aux obligations d’un Membre exportateur au titre de l’article 31f) de l’accord sur les ADPIC «en ce qui concerne l’octroi par ce membre d’une licence obligatoire dans la mesure nécessaire aux fins de la production d’un (de) produits(s) pharmaceutique(s) et de son (leur) exportation vers un (des) Membre(s) importateur(s) admissible(s)… ».

Des modalités précises doivent être respectées, pour la notification par le Membre importateur (il spécifie les noms et les quantités de produits attendues, il établit – sauf s’il est un PMA – qu’il a des capacités de fabrication insuffisantes ou inexistantes pour le produit considéré, il accorde lui-même une LO pour le cas où le produit est breveté sur son territoire) , pour la délivrance de la LO par le Membre exportateur, notamment quant à l’identification des médicaments en question. La déclaration prévoit la création d’une page web sur le site de l’OMC pour rendre publiques les notifications faites par les Etats membres lorsqu’ils utilisent le système.

Cela suppose que les Etats exportateurs potentiels révisent si nécessaire leur législation. Norvège, Canada, Inde et UE ont informé le Conseil des ADPIC qu’ils avaient procédé aux modifications nécessaires. Pour l’UE, il s’agit du règlement 816/2006 du 17 mai 2006.

La dérogation est provisoire, jusqu’à son remplacement par une solution permanente, un amendement à l’accord ADPIC, étape finale. Un accord a été trouvé entre les membres de l’OMC (qui se détache du paquet global attendu du cycle de Doha) le 6 décembre 2005. Le Protocole portant amendement de l’Accord sur les ADPIC est soumis à ratification. La date butoir du 1er décembre 2007, toujours reportée en 2007, en 2009, en 2011, en 2013 au 31 décembre 2015, vient d’être à nouveau reportée en 2015 jusqu’au 31 décembre 2017 ! A ce jour, sur les 2/3 nécessaires d’Etats Membres de l’OMC (pour que le protocole entre en vigueur pour ces Etats-là) – soit 108 sur 162, on compte 69 Etats membres – dont le Brésil (13 novembre 2008) et l’Argentine (20 octobre 2011) comme les Etats-Unis (17 décembre 2015) – et l’UE (30 novembre 2007) seule compétente pour ses 28 Etats membres. Il manque encore quelques ratifications.

En théorie, le protocole est remarquable car il s’agit de l’amendement d’un accord fondamental de l’OMC au cours d’un processus de négociations commerciales mondiales bloqué jusqu’à l’accord encore partiel de Bali (en décembre 2013), qui montre que l’OMC peut être sensible à un enjeu mondial non commercial de santé publique, dont l’exigence prévaut sur celle de la liberté des échanges combinée au respect de la propriété intellectuelle.

L’Organe de règlement des différends de l’OMC a déjà manifesté son ouverture à la préoccupation de l’environnement (le préambule de l’accord de Marrakech fait référence au développement durable) ainsi qu’à celle de la santé publique dans l’affaire de l’amiante (Canada contre CE/Communautés européennes, Organe d’appel, 12 mars 2001) et dans celle des pneumatiques rechapés (CE contre Brésil, Organe d’appel, 3 décembre 2007 ; les déchets que constitue l’accumulation de ces pneus est un risque pour l’environnement et pour la santé, même si la mesure brésilienne est jugée discriminatoire), mais, dans ces affaires, étaient en cause des mesures protectionnistes, légitimées dans certaines conditions par le droit de l’OMC.

Avec le Protocole, c’est le droit de la propriété intellectuelle selon l’OMC qui se réforme pour faire place à un autre type de commerce, un commerce éthique. On peut y voir la mise en œuvre d’une notion, nouvelle, de « sécurité sanitaire » par analogie avec la notion de sécurité alimentaire, utilisée pour définir un autre type d’accès, l’accès à une nourriture obéissant à certains critères de quantité et de qualité. Dans les deux cas, l’accès signifie soit la capacité de produire les biens nécessaires soit la capacité de se les procurer sur le marché.

De plus, le protocole constitue une ébauche de conciliation des différents corpus, de ceux de l’OMS et de l’OMC. L’interaction des questions de santé, de propriété intellectuelle et de commerce pousse à la coordination des travaux entre ces organisations internationales. En 2002, une étude conjointe OMS-OMC a été publiée sur la relation entre les règles commerciales et la santé (Les accords de l’OMC et la Sante Publique, étude conjointe de l’OMS et du Secrétariat de l’OMC, Genève, 22 août 2002, http://www.who.int ou http://www.wto.org/french/res_f/publication, consultés le 28 décembre 2015).

En 2013, une publication trilatérale OMC-OMPI (Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle)-OMS intitulée «Promouvoir l’accès aux technologies et l’innovation dans le domaine médical» a été lancée au siège de l’OMC (L’OMS, l’OMPI et l’OMC publient une étude sur l’innovation dans le domaine médical et l’accès aux médicaments, Communiqué de presse conjoint, 5 février 2013, Genève, http://www.who.int, consulté le 28 décembre 2015).

2 – Le dispositif d’APA du Protocole de Nagoya

Le Protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation relatif à la Convention sur la diversité biologique, adopté le 29 octobre 2010, à Nagoya, au Japon, est entré en vigueur le 12 octobre 2014 pour 73 parties dont l’Union européenne (16 mai 2014) ; le Brésil, l’Argentine, le Portugal et la France ne l’ont pas encore ratifié.

2a – Le contrat de partage des avantages

 Il prévoit la délivrance d’un permis ou équivalent par l’Etat, qui vaut certificat de conformité à l’échelle internationale, et la conclusion d’un contrat de partage des avantages entre un Etat fournisseur et un Etat utilisateur comme condition de ce permis.

L’article 15 (Respect des dispositions législatives ou réglementaires internes sur l’accès et le partage des avantages) , dispose en son §1 que « Chaque Partie prend des mesures législatives, administratives ou de politique générale appropriées, efficaces et proportionnées afin de garantir que l’accès aux ressources génétiques utilisées sous sa juridiction a fait l’objet d’un consentement préalable donné en connaissance de cause et que des conditions convenues d’un commun accord ont été établies, conformément à la législation ou aux dispositions législatives ou réglementaires internes relatives à l’accès et au partage des avantages de l’autre Partie ». Le protocole fonde des dispositifs d’APA nationaux qui visent clairement les pratiques des entreprises.

L’accès au partage des avantages intéresse la France. Son espace outre-mer abrite les quatre cinquième de sa biodiversité et une importante pharmacopée.

(Accès aux ressources génétiques et partage juste et équitable des avantages liés à leur utilisation, http://www.developpement-durable.gouv.fr, mis à jour le 2 juillet 2012, consulté le 28 décembre 2015).

La Stratégie nationale pour la biodiversité a été adoptée le 19 mai 2011. L’Etat s’est engagé à mettre en place un cadre juridique national sur l’accès aux ressources génétiques et le partage des avantages, en tenant compte des spécificités institutionnelles et des dispositifs existants en outre-mer. Le Projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages est en cours de discussion. Dans l’attente d’une réglementation générale, en 2012, le Conseil régional de Guyane a demandé une habilitation au parlement (n°102, Délibération n° 003673 du 21 décembre 2012 du conseil régional de la Guyane relatif à l’accès à la ressource biologique et génétique et partage des avantages APA – demande d’habilitation, NOR: CTRX1307549X) aux fins de fixer spécifiquement pour le territoire de la Guyane des règles sur l’accès aux ressources biologiques, aux connaissances traditionnelles associées et sur le partage juste et équitable découlant de leur utilisation, tandis que le législateur n’a reconnu le principe d’un dispositif d’APA que pour le seul parc amazonien de Guyane.

La délibération considère « l’impérieuse nécessité de mettre un terme au pillage des ressources biologiques en Guyane » et la nécessité « d’éviter les dérives liées au biopiratage » ! L’Union européenne a adopté un règlement sur le sujet en 2014 (règlement (UE) n ° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux mesures concernant le respect par les utilisateurs dans l’Union du protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation).

2b – Les avantages monétaires et non monétaires

Le contrat de partage va servir à la conservation de la biodiversité ; l’article 9 du protocole, « Contribution à la conservation et à l’utilisation durable », le prévoit expressément. Il peut aussi contribuer à l’accès des Etats en développement aux médicaments. Cela résulte de l’annexe au protocole qui contient une liste indicative d’avantages monétaires et non monétaires. Dans cette liste figurent le financement de la recherche, les coentreprises, la copropriété des droits de propriété intellectuelle (avantages monétaires), le partage des résultats de la recherche, le transfert des biotechnologies, le renforcement des capacités en matière de transfert de technologie (avantages non monétaires).

Pourtant le droit d’accès aux biomédicaments n’est pas garanti par ce genre de dispositif.

II – Les conditions d’un véritable droit d’accès des PED aux médicaments et biomédicaments

Aucun des deux corpus ne garantit un véritable droit d’accès ; les efforts devraient se porter sur le développement d’un droit, qui est simplement énoncé dans chacun de ces corpus, et qui pourrait donner de la cohésion à l’ensemble des deux, le droit au transfert de technologie. Cela peut surprendre car ce droit n’est pas une idée nouvelle, mais il n’a jamais fait l’objet d’un développement juridique précis et contraignant.

A – L’absence d’un véritable droit d’accès dans les corpus du commerce et de la biodiversité

Il est impossible juridiquement de parler d’un véritable droit d’accès, que ce soit aux médicaments en général ou aux biomédicaments en particulier. La convention BD est d’ailleurs encore plus éloignée de ce droit d’accès que le droit de l’OMC.

1 – Un faux droit d’accès au sein de l’OMC

1a – Un simple droit à la régulation des flux de médicaments

Le système mis en place par l’OMC est complexe et ne permet pas de parler d’un véritable droit d’accès. Il reflète la nature de l’OMC qui, plutôt qu’une organisation de réglementation, est une organisation de régulation. Les critiques sont accablantes !

La décision organise un système de commerce international entre membres importateurs admissibles et membres exportateurs, avec rémunération adéquate, sans possibilité de réexportation. Un « membre importateur admissible » s’entend de tout PMA membre et de tout autre membre qui a notifié au Conseil des ADPIC son intention d’utiliser le système en tant qu’importateur, étant précisé que certains membres n’utiliseront pas le système. Trente-trois Etats ont ainsi déclaré qu’ils n’utiliseront pas le système : tous les membres de l’UE sauf 3 (Roumanie, Bulgarie, Croatie) et 8 autres Etats (Canada, USA…). Par ailleurs, conformément à la déclaration, 11 Etats membres ont annoncé volontairement qu’ils n’utiliseraient le système qu’en cas d’urgence nationale ou autre circonstance d’extrême urgence (ex : Chine, Turquie, Mexique).

Les PMA bénéficient d’un traitement spécial et différencié. Ils peuvent attendre jusqu’à 2016 pour protéger les droits de brevet sur les produits pharmaceutiques. Tant qu’un médicament n’est pas breveté dans un PMA, le gouvernement de cet Etat n’a pas besoin de délivrer une LO pour l’importer. Mais l’Etat fournisseur doit délivrer une LO pour l’exportation d’une copie générique d’un médicament breveté sur son territoire. Cette flexibilité maximale pour les PMA, a été prorogée le 6 novembre 2015 jusqu’à janvier 2033 (choix de protéger ou non).

En pratique, le site de l’OMC fait apparaître une seule notification de membre importateur, celle du Rwanda, le 19 juillet 2007, une seule notification de membre exportateur, celle du Canada, le 8 octobre 2007, une seule entente Rwanda/Canada. Le Canada autorise l’entreprise APOTEX Inc., en septembre 2007, en vertu de la loi sur les brevets de 2004 (engagement de Jean Chrétien envers l’Afrique), à exporter vers le Rwanda le Apo-TriAvir, le médicament générique à triple combinaison produit pour simplifier le traitement du SIDA dans les pays en développement (Deuxième envoi vers l’Afrique d’un médicament salvateur contre le SIDA, http://www.apotex.com, mis en ligne le 18 septembre 2009, consulté le 28 décembre 2015).

Le Rwanda est le seul pays à avoir profité du Régime canadien d’accès aux médicaments (RCAM). Le processus doit être repris à zéro si le Rwanda désire commander d’autres quantités du même médicament ou si tout autre pays en développement désire en commander. À ce jour, aucun autre pays en développement n’a fait part de son intention de se soumettre à l’épreuve du RCAM. Côté entreprise, le système est tellement coûteux et complexe qu’aucune aucune autre société n’a décidé de produire des médicaments génériques salvateurs et abordables pour les exporter vers des pays en développement.

Le succès du droit de l’OMC est surtout d’avoir conforté la puissance économique émergente de quelques pays an matière pharmaceutique en leur permettant clairement de délivrer des LO et en leur donnant, avec plus ou moins de réussite, une capacité de menace commerciale à l’égard des entreprises étrangères. Ainsi, trois Etats ont fait l’objet d’une étude comparative, le Brésil, la Thaïlande et l’Inde, qui montre que, à travers trois postures différentes, ces pays ont pu avoir une véritable influence sur le marché mondial des médicaments.

Le Brésil et la Thaïlande ont utilisé la flexibilité permise en cas d’usage gouvernemental et non commercial destiné à approvisionner un programme d’accès universel aux médicaments essentiels et pu ainsi obtenir des réductions de prix des médicaments vendus par les entreprises étrangères (alors qu’il n’est pas rare que les médicaments vendus dans les PED soient plus chers). L’Inde a soutenu juridiquement ses propres entreprises privées en profitant des flexibilités offertes par l’OMC et aussi en limitant la brevetabilité des inventions jugées mineures ; elle a aussi amendé sa loi sur les brevets pour autoriser les exportations de médicaments sous licence obligatoire.

En réalité, le droit d’accès est un objectif éthique qui sous-tend le système juridique de l’OMC ; le système ouvre des possibilités légitimes et légales de fabrication et de commercialisation internationale, conditionnées par la capacité économique de fabriquer et faire jouer la concurrence, mais il ne garantit pas l’accès comme un droit des PED opposable aux autres Etats d’accéder directement aux médicaments. Des procès sont malgré tout possibles devant la justice nationale, non pas pour faire valoir « le droit d’une entreprise à une licence obligatoire » dans les conditions du droit de l’OMC, car l’Etat n’est pas obligé de délivrer une LO, mais pour contester des brevets et dégager un espace pour la fabrication locale de médicaments, comme le montrent des procès en Thaïlande et en Inde.

Un doute est permis sur la conscience des Etats membres de l’OMC de vouloir réellement faciliter l’accès des PED aux médicaments tellement le système règlementaire d’accès de l’OMC est complexe, administré, voire bureaucratique. Les Etats ont lâché du lest sur la question de l’interprétation de l’accord ADPIC quant aux LO pour la fabrication locale sous la pression des Etats émergents, mais ont verrouillé l’accord sur le commerce international des médicaments génériques produits sous LO.

L’accord est un maillage étroit de procédures et de conditions « aboutissant à un processus lourd de prise de décisions « au cas par cas », molécule par molécule et pays par pays ; « la stratégie consistant à donner d’une main et à reprendre de l’autre ne peut que nourrir la rhétorique des adversaires de l’OMC et affaiblir le cadre multilatéral ». « Peut-être est-ce ce que certains souhaitent ? » n’hésite pas à suggérer Mehdi Abbas (Accès aux médicaments : cinq leçons à tirer d’une négociation au long cours, Le Monde Economie, 11 décembre 2007).

Les trois Organisations non gouvernementales qui se sont adressées au Conseil exécutif de l’OMS en janvier 2013 ont dénoncé le rapport trilatéral OMS-OMPI-OMC «comme un document inconsistant et sans ambition qui ne reflète pas pleinement les travaux réalisés par l’OMS dans ces domaines conformément à son mandat ». Selon elles, « L’avenir nous dira si le Secrétariat de l’OMS et ses États membres estiment que les actions et le soutien aux pays en matière de propriété intellectuelle et de santé représentent une ouverture ou un problème à éviter, notamment dans le cas d’un éventuel traité international sur le financement de la Recherche-Développement pharmaceutique. Ce serait peut-être l’occasion pour cet organisme spécialisé des Nations Unies de redécouvrir son identité et sa raison d’être au XXIe siècle ». La philosophie de l’OMC n’est pas celle de l’OMS.

1b – Des flexibilités menacées par le comportement de certains Etats

Ensuite, les comportements de certains Etats hypothèquent sérieusement la mise en œuvre de la décision de 2003.

Selon l’ONG Act up (sur les médicaments génériques : l’UE fait la sourde oreille, http://wwwactupparis.org, mis en ligne le 29 juillet 2013, consulté le 29 décembre 2015), « Ces dernières années, plusieurs cargaisons de médicaments génériques transitant par le territoire de l’Union européenne ont été saisies sous couvert de violation de la « propriété intellectuelle », alors même que ces médicaments ne tombaient sous le coup d’aucun brevet dans les pays de provenance et de destination. Ce fut par exemple le cas d’une cargaison de Losartan (médicament contre l’hypertension artérielle) en provenance de l’Inde et à destination du Brésil, saisie à Rotterdam en décembre 2008 et renvoyée en Inde 36 jours plus tard. L’Inde et le Brésil avaient alors protesté auprès de l’UE et de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dénonçant des pratiques abusives et répétées. En effet, sur la seule année 2008, c’est 17 cargaisons de médicaments génériques qui ont été saisies par les autorités néerlandaises ».

Des Etats membres sont accusés de réaliser un contrôle des marchandises en transit, sur le fondement du règlement européen 608/2013 du 12 juin 2013 (qui remplace le règlement 1383/2003) concernant le contrôle, par les autorités douanières, du respect des droits de propriété intellectuelle, qui handicape l’accès des PED aux médicaments. «Le nouveau règlement européen va à l’encontre de l’engagement de l’UE en introduisant des dispositions dites ADPIC+, c’est-à-dire des dispositions qui confèrent davantage de droits et de garanties pour les détenteurs de brevets :

– les marchandises contrevenant à un brevet peuvent être contrôlées et saisies, alors que dans l’accord sur les ADPIC, seules les contrefaçons (atteinte au droit des marques) et les marchandises pirates (atteinte au droit d’auteur) doivent faire l’objet d’un contrôle.

– l’intervention des douanes peut se faire sur des marchandises en transit, tandis que dans l’accord sur les ADPIC, seules les importations doivent faire l’objet d’un contrôle.

En autorisant le contrôle et la saisie de médicaments en transit, et en élargissant le champ de ces contrôles aux brevets, l’Union européenne va non seulement au-delà des dispositions de l’ADPIC, mais entrave les pays du Sud dans l’utilisation des flexibilités qui leur sont accordées».

Le règlement prévoit d’ailleurs, dans son article 37, que la Commission devra présenter d’ici le 31 décembre 2016 un rapport sur la mise en œuvre du règlement signalant tout « incident significatif » concernant des médicaments en transit et évaluant l’impact potentiel de cet incident sur les engagements de l’UE en matière d’accès aux médicaments énoncés dans la Déclaration de Doha sur l’Accord sur les ADPIC et la santé publique.

Le recours aux clauses ADPIC +, c’est aussi ce qui est critiqué dans certains accords bilatéraux de libre-échange. Ces clauses limitent les circonstances dans lesquelles les LO peuvent être émises ou prolongent la durée de vie des brevets au-delà des 20 ans ou permettent le brevetage du vivant dans des conditions minimales d’invention (pour la découverte d’une composante biologique jusqu’alors inconnue, l’isolement d’un gène). Les Etats-Unis ont inclus de telles clauses dans les accords qu’ils ont négocié avec le Chili, La Jordanie, le Maroc, Singapour, l’Australie, la Colombie, le Pérou, la Thaïlande. (Les Accords de libre-échange : menaces sur l’Amazonie, http://www.alternatives.internationales.fr, mis en ligne en mars 2009, consulté le 4 janvier 2015).

L’Accord de libre-échange centre-américain, entré en vigueur en 2006, contient un article ADPIC + qui oblige les autorités d’approbation commerciale à notifier au détenteur de brevet l’existence d’un tiers demandant une approbation commerciale pour ce produit. Ce détenteur devra donner son consentement avant l’émission de toute approbation commerciale pendant la durée du brevet.

L’accord de partenariat transpacifique récemment signé (le 4 février 2016) entre les Etats-Unis et onze pays dont 4 PED (Malaisie, Mexique, Pérou, Vietnam), soulève aussi des inquiétudes. Australie, Chili et Pérou se sont inquiétés pendant les négociations des droits des entreprises américaines (partenariat transpacifique, un accord entre les Etats-Unis et onze pays, http://www.lemonde.fr/economie/article/2015/10/05/partenariat-transpacifique-un-accord-entre-les-etats-unis-et-onze-pays_4782836_3234.html#VjzrqzAPX9i28BEz.99).

« L’Accord de partenariat transpacifique (TPP) pourrait mener au monopole des plus grands groupes pharmaceutiques, en limitant l’accès des habitants aux médicaments vitaux dans les pays concernés et arrêtera les projets des biovaccins, y compris contre le cancer, ont conclu des experts de WikiLeaks se basant sur le texte secret publié par une source impliquée dans le TPP. Or, dans ce document dévoilé par le site lanceur d’alerte, il est réclamé d’arrêter « l’élaboration, la production et l’accès aux préparations biologiques composés de l’albumine des plantes, des animaux et du sang humain s’ils n’ont pas de brevets ou ne sont pas en attente de réception du brevet ». Toute la branche se heurtera à la nécessité de recevoir une nouvelle licence. Il s’agit non seulement du médicament en lui-même, mais aussi des méthodes de sa réception, c’est pour cela que les sociétés pharmaceutiques ayant déjà cette licence, « recevront un droit d’exclusivité », indique l’analyse. Des préparations vitales comme l’insuline pourront être interdites car les sociétés régionales n’auront pas de brevets pour sa production, selon la loi des brevets américaine. L’accord prévoit deux variantes d’adaptation du marché pharmaceutique, pour cinq et huit ans. Cependant, les experts ont des craintes que cela puisse prendre plus de temps et que la situation mènerait à l’augmentation considérable des prix de la production à cause du prix élevé de réception de la licence ».

(Douze pays signent l’accord sur le partenariat transpacifique, http://fr.sputniknews.com/international/20151009/1018734608.html#ixzz3u1aazuVQ, mis en ligne le 9 octobre 2015, consulté le 4 décembre 2015).

Le texte final privilégie les entreprises au détriment de l’accès aux médicaments (l’accord étend les droits de propriété intellectuelle au détriment de l’accès, Carlos M. Correa, Centre Sud, septembre 2015, http://www.southcentre.int/wp-content, consulté le 6 avril 2016).

Les négociations entre l’Inde et l’UE sur l’accord de libre-échange et d’investissement suscitent les mêmes craintes ; Médecins sans frontières appelle l’Inde à résister à la stratégie nord-américaine et européenne.

(« L’Inde est devenue le plus grand producteur de médicaments génériques. Elle en alimente non seulement son propre marché, mais aussi ceux des pays du tiers-monde. Donnant ainsi accès aux plus démunis à des traitements très onéreux, notamment contre le SIDA et nombre de cancers. De son côté, l’Europe juge que le prix exorbitant des médicaments protégés par des patentes se justifie car il sert à faire avancer la science via la recherche.

Le bras de fer s’annonce difficile. Début avril, la Cour suprême de New Delhi a rejeté la demande de brevet du laboratoire suisse Novartis sur le Glivec, un traitement contre la leucémie. Si elle représente un revers pour l’industrie pharmaceutique en Inde, cette décision a largement emporté l’adhésion des ONG du monde entier. D’ores et déjà, certaines d’entre elles manifestent à Bruxelles contre un accord Inde-UE. « L’accord de libre-échange entre l’Inde et l’UE met des millions de vies en danger », avertissent ainsi les militants d’Act Up, une association de lutte contre le SIDA ».

Inde-UE : réunion cruciale sur un accord de libre-échange, 12 avril 2013 http://blog.lefigaro.fr, consulté le 24 février 2016)

(« Les négociations de l’accord de libre-échange avec l’Inde se déroulent à huis clos. D’après les textes qui ont fui, il semblerait que cet accord contienne des dispositions qui offrent à l’industrie pharmaceutique de nombreuses armes pour combattre les médicaments génériques produits en Inde. Ainsi, le droit d’entamer des poursuites judiciaires est élargi, ce qui pourrait entrainer le ralentissement, la confiscation et la destruction des exportations indiennes de médicaments génériques légitimes, sur simple suspicion d’infraction. Ensuite, le droit à la protection des investissements est étendu, de sorte que les fabricants de marque pourront poursuivre le gouvernement indien, les fournisseurs, les transporteurs et les organisations humanitaires telles que Médecins Sans Frontières. La Commission européenne négocie depuis 2007 déjà avec l’Inde au sujet de cet accord. Selon la rumeur, il pourrait être signé d’un instant à l’autre. Des protestations se sont déjà élevées en Asie, en Europe et en Afrique, le continent qui serait le plus touché par ce traité. En outre, l’accord de libre-échange avec l’Inde n’est pas une exception : l’Union européenne négocie aussi actuellement avec l’ANASE (Association des nations de l’Asie du Sud-Est), la Malaisie et l’Ukraine. La Thaïlande, le Maroc, la Tunisie et l’Égypte, entre autres, sont aussi sur la liste ».

L’accord de libre-échange UE-Inde menace des millions de vies, 9 avril 2013 http://www.msf-azg.be, consulté le 24 janvier 2016)

(« MSF appelle le Premier ministre indien Narendra Modi à résister aux pressions croissantes de la part des Etats-Unis, du Japon et de l’Union européenne, qui visent à restreindre la capacité de l’Inde à produire des médicaments abordables. Cet appel intervient alors que la huitième session de négociations sur l’accord commercial RCEP (Regional Comprehensive Economic Partnership, ou Partenariat économique global régional) est en cours à Kyoto, au Japon. Cet accord contient des propositions qui, si acceptées, réduiraient l’accès aux médicaments génériques produits dans le pays.

MSF utilise des médicaments génériques produits en Inde pour traiter 80% des 200 000 personnes vivant avec le VIH dans ses projets, mais aussi d’autres maladies, comme la tuberculose et le paludisme. L’Inde produit également des versions génériques, donc abordables, de médicaments pour le traitement des maladies non transmissibles, ces derniers étant eux-mêmes trop chers pour les systèmes de santé des pays développés.

« En tant que médecins qui dépendons des médicaments et des vaccins fabriqués en Inde pour faire notre travail, nous ne pouvons pas nous taire pendant que l’on cherche à couper l’accès à des médicaments essentiels, dans nos projets et au-delà, déclare le Dr Joanne Liu, présidente internationale de MSF. Nous souhaitons envoyer un message fort en soutien à l’Inde, afin qu’elle continue d’être ‘la pharmacie des pays en développement’ ».

MSF appelle l’Inde à garantir l’accès à des médicaments abordables, http://www.msf, mis en ligne le 17 juin 2015, consulté le 24 février 2016).

Les clauses ADPIC + sont-elles condamnables au regard du droit de l’OMC ? Tout d’abord, la mise en oeuvre de l’accord ADPIC, si elle modifie la situation par rapport au passé en instaurant désormais une protection par le recours au brevet, supprime légalement des possibilités pour les entreprises qui agissaient jusqu’alors sans brevet ; mais cette situation nouvelle est dans la logique de la protection de la propriété intellectuelle, dans la logique de la privatisation du vivant.

Ensuite, les clauses sont permises dans la mesure où les dispositions de l’OMC fixent des garanties minimales qui peuvent être renforcées par les Etats (notamment la durée des brevets). Enfin, les Etats peuvent renoncer bilatéralement à la possibilité de délivrer des licences obligatoires. En effet, la dérogation interprétant l’accord ADPIC s’applique à tous les membres de l’OMC et s’appliquera pour chaque membre jusqu’à l’entrée en vigueur du protocole pour cet Etat, donc les Etats-Unis sont liés par cette dérogation. Mais les Etats étant liés par les deux traités, l’accord ADPIC et l’accord bilatéral, n’appliquent le traité antérieur que dans la mesure de sa compatibilité avec le traité postérieur, selon l’article 30 de la Convention de Vienne sur le droit des traités (sur l’application de traités successifs portant sur la même matière).

Seule la valeur de jus cogens (droit impératif du droit international général) du droit de délivrer des LO pourrait empêcher des dispositions contraires, mais les comportements de certains Etats montrent qu’une telle reconnaissance n’est pas à l’ordre du jour.

2 – Le dispositif inadapté du Protocole de Nagoya

Il est reproché au Protocole de Nagoya d’être un dispositif inadapté pour différentes raisons.

2a – La rémunération des ressources brutes à prélever

Le protocole se révèle « dans bien des cas, inadapté aux pratiques actuelles de l’industrie pharmaceutique», car « il ne s’applique pas aux molécules naturelles modifiées ou intégralement imitées par la chimie, qui constituent presque 40 % des nouvelles substances introduites sur le marché américain entre 1981 et 2006 – contre 4 % de médicaments contenant directement l’extrait ou la molécule naturelle, seuls concernés par le texte » (De la plante au médicament, Angela Bolis, Le Monde, http://www.lemonde.fr/planete/visuel/2014/10/11, consulté le 24 février 2016). Le protocole ne s’appliquerait qu’au moment de la collecte des ressources. Le reproche est excessif car le protocole s’efforce d’anticiper les retombées économiques et d’y faire participer les PED fournisseurs de biodiversité. Mais il est vrai que la contrat de partage peut se contenter d’une (supposée) juste  rémunération des ressources prélevées au terme de la bioprospection.

2b- La fin du boom technologique ?

 Une nouvelle technologie est arrivée dans les années 90, le criblage haut débit d’extraits végétaux.

(« Au laboratoire Pierre Fabre comme dans les plus grands groupes pharmaceutiques, la recherche sur les substances naturelles connaît un tournant dans les années 1990, avec l’arrivée d’une nouvelle technologie : le criblage haut débit. Des robots se mettent à analyser des milliers d’extraits végétaux par jour pour y détecter des molécules actives, susceptibles d’être efficaces contre telle ou telle pathologie. La méthode exige un nombre considérable de substances naturelles à passer au crible. Laboratoires et centres de recherche étoffent donc leurs collections végétales à l’aide de campagnes de prospection dans les forêts et autres écosystèmes les plus riches en biodiversité.

Dans le public aussi, bioprospection et criblage robotisé connaissent leur heure de gloire. A l’Institut de chimie des substances naturelles (ICSN) du CNRS de Gif-sur-Yvette (Essonne), Marc Litaudon et Vincent Dumontet ont ainsi établi des collaborations officielles avec la Malaisie, le Vietnam, Madagascar, l’Ouganda, la Guyane ou encore la Nouvelle-Calédonie pour collecter des plantes – jusqu’à 6 000 aujourd’hui. Celles-ci sont récoltées sur le terrain, identifiées, puis séchées et extraites par des solvants, jusqu’à aboutir à un extrait végétal mis en plaque dans de petits tubes, prêts pour le criblage. Si une molécule active est alors détectée, le chimiste l’isole, puis identifie sa structure, afin de la reproduire intégralement, par synthèse, ou la modifier en partie, par hémisynthèse. Le but : aboutir à une molécule unique, simplifiée et améliorée, facile à produire en laboratoire, http://www.lemonde.fr/planete/visuel/2014/10/11/de-la-plante-au-medicament_4504158_3244.html#qvVq5SZiLLYOu7Im.99, consulté le 24 février 2016).

Mais il n’est même pas assuré que ce boom technologique se poursuive. Beaucoup de laboratoires ont déjà constitué des collections végétales et le Protocole de Nagoya n’est pas rétroactif. La pharmacopée traditionnelle intéresse peu l’industrie pharmaceutique. Les recherches misent sur la chimie combinatoire, qui n’utilise pas les recherches (peu rentables) sur les substances naturelles. La recherche pharmaceutique sur la biodiversité reste cependant d’actualité, mais risque de s’éloigner de la biodiversité telle qu’envisagée par la convention de 1992, en s’orientant vers les micro-organismes ou les organismes des grands fonds marins et des milieux extrêmes.

(« Parmi ces extraits de plantes, combien proviennent aussi de pays du Sud ? Beaucoup de laboratoires comptent désormais sur des collections végétales « à domicile » déjà bien étoffées par des décennies de collecte. « Le parc botanique de Kew gardens, en Angleterre, compte quelque 30 000 espèces, pourquoi aller chercher ailleurs ? », fait remarquer Marc Litaudon. Or le protocole de Nagoya ne prévoit pas d’application rétroactive pour les plantes récoltées avant son entrée en vigueur.

Enfin, l’image d’un guérisseur aiguillant la recherche pharmaceutique grâce à ses fameux « savoirs locaux », chers au protocole, semble une fois encore bien éloigné de la pratique. Certes, les effets des plantes utilisées dans la médecine traditionnelle sont confirmés dans trois quarts des cas par les ethnopharmacologues, d’après Jacques Fleurentin. Et certains laboratoires s’y sont intéressés de près, comme Shaman pharmaceuticals – qui a depuis fait faillite. Mais en l’absence de retours sur investissement, l’industrie pharmaceutique s’en est rapidement détournée.

Peut-être parce que les laboratoires voulaient, justement, éviter toute insécurité juridique autour d’éventuels droits de propriété intellectuelle que pourraient revendiquer les communautés utilisant ces plantes. Mais aussi parce que ces connaissances ne sont pas forcément adaptées à leurs besoins. Il n’est pas certain qu’elles présentent un net avantage par rapport aux nombreuses substances déjà sur le marché, surtout pour les pathologies qui suscitent le plus d’efforts de recherche, comme le cancer. Pas évident, non plus, que les préparations des guérisseurs soient facilement commercialisables : il s’agit souvent d’un mélange de plantes fraîches, ou de plantes dont plusieurs molécules agissent en convergence. Tout l’inverse de ce que cherche l’industrie pharmaceutique : une molécule unique, isolable et brevetable.

Si le partage des bénéfices se fait attendre, c’est aussi parce qu’il n’y a, bien souvent, tout simplement aucun bénéfice à partager. Ces longues recherches, même si elles contribuent à faire avancer les connaissances dans les champs de la chimie, de la biologie et de la botanique, n’aboutissent que très rarement à un produit commercialisé. Chez Pierre Fabre, les activités de prospection et de criblage ont pour l’instant été infructueuses, et se poursuivent toujours, depuis quinze ans, dans l’espoir de mettre sur le marché, un jour, un nouveau médicament. Même scénario à l’ICSN : il y a bien eu des molécules actives trouvées, des brevets déposés, mais ceux-ci ne sont jamais parvenus à franchir les multiples tests préalables à une mise sur le marché.

Face à ce manque de rentabilité, la plupart des grands laboratoires pharmaceutiques ont finalement mis un terme à leurs recherches sur les substances naturelles pour se tourner vers les molécules directement fabriquées par les laboratoires de chimie. La chimie combinatoire, notamment, a permis d’assembler des millions de molécules, au hasard, à moindre coût, plus simplement et dans un cadre juridique plus clair que les molécules issues de la nature. Elle alimente d’immenses chimiothèques, que les robots criblent sans relâche à la recherche de molécules actives.

Là aussi, pourtant, le succès a été mitigé – même si 41 % des substances développées entre 1981 et 2006 étaient issues de ces molécules sans origine naturelle. « La chimie combinatoire produit plus que la nature, mais moins bien : des molécules très simples, qui ont très peu de chance d’avoir une utilité quelconque, explique Marc Litaudon. Alors que la molécule naturelle a une structure d’une complexité et d’un raffinement que l’homme est incapable d’imaginer. Elle est le fruit de millions d’années de sélection, donc elle a forcément une utilité biologique. » « La recherche sur les substances naturelles revient petit à petit à la mode, renchérit Françoise Guéritte. C’est cyclique. »

Toujours est-il que ces recherches ne puiseront plus forcément dans la biodiversité telle qu’imaginée aux premières heures des grandes négociations environnementales : ce sont de plus en plus les micro-organismes et les organismes des grands fonds marins ou des milieux extrêmes qui inspirent les scientifiques. Pour autant, le protocole de Nagoya aura toujours le mérite de poser un cadre plus systématisé, internationalement reconnu, afin de réguler le grand marché de la biodiversité, estime Catherine Aubertin. « C’est au moins la reconnaissance qu’on ne peut plus faire son marché n’importe comment dans les pays du Sud, c’est la fin d’un certain esprit colonial qui a longtemps prévalu dans la recherche en botanique ».

(http://www.lemonde.fr/planete/visuel/2014/10/11/de-la-plante-au-medicament_4504158_3244.html#qvVq5SZiLLYOu7Im.99, consulté le 24 février 2016).

Le Protocole de Nagoya aurait donc surtout un intérêt symbolique, celui de reconnaître qu’on ne peut plus traiter la biodiversité comme un champ ouvert au pillage et au biopiratage ?! Il conserve quand même un intérêt réel de reconnaître un droit à une rémunération juste qui peut ensuite contribuer financièrement au développement d’une industrie pharmaceutique dans les conditions du droit de l’OMC et de concourir à la reconnaissance d’un droit d’accès aux médicaments.

Les deux corpus sont complémentaires mais ne convergent pas directement vers un droit effectif d’accès aux médicaments. Ils ont toutefois un point commun qui pourrait assurer cette convergence.

B – Le développement nécessaire du droit au transfert et au partage des technologies

Un véritable droit d’accès aux médicaments pourrait se traduire par le droit à des transferts et partage de technologie pharmaceutique. Ce droit se situe clairement dans l’esprit de la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement qui énonce le principe des responsabilités communes mais différenciées (principe 7) et peut trouver sa place dans la responsabilité sociétale des entreprises pharmaceutiques.

1 – L’expression des responsabilités communes mais différenciées des Etats

Selon le principe 7, les Etats doivent coopérer pour la protection de l’écosystème terrestre, mais les Etats développés ont une responsabilité particulière à l’égard des PED dans l’effort en faveur du développement durable. La question des transferts de technologie, très liée à la revendication d’un nouvel ordre économique dans les années 70, est elle-même renouvelée par l’enjeu de santé publique, dans la rencontre du commerce mondial et de la biodiversité.

1a – Les transferts de technologie dans l’accord ADPIC

Ces transferts sont prévus par l’accord ADPIC et associés à la notion de protection. L’article 66.2 dispose que « les pays développés membres offriront des incitations aux entreprises et institutions sur leur territoire afin de promouvoir et d’encourager le transfert de technologie vers les pays membres les moins avancés pour leur permettre de se doter d’une base technologique solide et viable ». Puis la déclaration de Doha convient d’un examen d’éventuelles mesures à prendre pour accroître les apports de technologie aux PED et non seulement aux PMA.

Mais « force est de constater que les dispositions concrètes manquent en comparaison des outils déployés pour assurer la protection des brevets » et l’accord ADPIC interdit même aux Etats, depuis 1995, d’utiliser dans leur législation sur les brevets la notion d’usage effectif d’un brevet sous la forme d’un production locale (clause de non-discrimination de l’article 27§1) (Guennif Samira, Droits de propriété intellectuelle et santé publique dans les pays du Sud, Transcontinentales (en ligne), 5/2007, document 2, mis en ligne le 21 avril 2011, consulté le 14 décembre 2015, URL : http://www. transcontinentales.revues.org/682).

L’UE a rendu son rapport du 28 septembre 2015 au Conseil des ADPIC (IP/C/W/611/Add7, 18 février 2016) en vertu du mécanisme de suivi de l’article 66.2 de l’accord ADPIC mis en place en 2003. On peut y lire : «Les efforts faits par les gouvernements des pays développés pour encourager et promouvoir le transfert de technologie sont généralement limités par deux facteurs: 1) la grande majorité de ces technologies ne leur appartiennent pas; 2) ils ne peuvent pas obliger le secteur privé à transférer ces technologies. Les incitations peuvent donc uniquement prendre la forme d’encouragement, de promotion et de facilitation de projets qui s’inscrivent dans le cadre d’une approche globale et exhaustive du développement ».

1b – Les transferts et partages de technologie dans le corpus biodiversité

La convention biodiversité traite aussi des transferts de technologie dans son article 16 «Accès à la technologie et transfert de technologie », celle-ci incluant expressément la biotechnologie. Cet article met en œuvre le principe des responsabilités différenciées. D’une façon générale, chaque partie contractante s’engage « à assurer et/ou à faciliter à d’autres parties contractantes » l’accès aux technologies (§1). En particulier, les PED bénéficient d’un traitement spécial et différencié, bien balisé juridiquement par le §2 : à des conditions justes et les plus favorables, y compris à des conditions de faveur et préférentielles s’il en est ainsi mutuellement convenu, en lien avec les mécanismes financiers prévus par la convention. Le paragraphe envisage le cas où cette technologie fait l’objet d’un brevet : l’accès et le transfert seront assurés d’une façon compatible avec la protection effective.

Ici, on peut déceler un véritable droit : l’accès et le transfert « sont assurés et/ou facilités »… et le §3 dispose, sur le mode indicatif, que « Chaque partie contractante prend, comme il convient, les mesures législatives, administratives ou de politique générale voulues pour que soit assuré aux Parties contractantes qui fournissent des ressources génétiques, en particulier celles qui sont des PED, l’accès à la technologie utilisant ces ressources et le transfert de ladite technologie selon des modalités mutuellement convenues, y compris à la technologie protégée par des brevets et autres droits de propriété intellectuelle… ». La convention renvoie aux législations nationales.

L’article 19

Le protocole de Nagoya contient un article 23 Transfert de technologie, collaboration et coopération, selon lequel les Parties « coopèrent aux programmes de recherche et de développement techniques et scientifiques, y compris les activités de recherche biotechnologique, afin de réaliser l’objectif du présent Protocole ».

« Les Parties s’engagent à appuyer et à encourager l’accès des pays en développement Parties à la technologie et le transfert de technologie à ces pays, en particulier les pays les moins avancés et les petits États insulaires en développement parmi eux, ainsi que les Parties à économie en transition, afin de favoriser le développement et le renforcement d’une base technologique et scientifique solide et viable pour la réalisation des objectifs de la Convention et du présent Protocole. Dans la mesure du possible et selon qu’il convient, ces activités de collaboration ont lieu sur le territoire et avec la participation de la Partie ou des Parties fournissant les ressources génétiques, qui sont les pays d’origine de ces ressources, ou des Parties qui les ont acquises conformément à la Convention ».

Ici, le protocole exige le développement de ce droit, laissé à la discrétion des législations nationales, afin qu’il devienne effectif. La Conférence des Parties à la Convention valant réunion des Parties au Protocole s’est tenue pour la première fois en Corée du 13 au 17 octobre 2014. Elle a adopté une décision en ce sens (NP MOP 1 décision NP-1/5, 20 octobre 2014) qui repose sur trois points :

  • Elle encourage la soumission des outils élaborés selon les articles 19 et 20 du Protocole au Centre d’échange d’information sur l’APA,
  • Elle encourage la mise à jour des outils pertinents pour les deux articles ayant déjà été élaborés avant le Protocole,
  • Décision est prise de faire le bilan de l’utilisation des outils ainsi que des lois coutumières des communautés autochtones et locales, les protocoles et procédures communautaires, 4 ans après l’entrée en vigueur du Protocole et en conjonction avec la première évaluation et le premier examen du Protocole.

Ici, le droit international se rapproche de la pratique. Les préoccupations des Etats portent sur les outils, «Clauses contractuelles types, codes de conduite volontaires, lignes directrices et bonnes pratiques et/ou normes (articles 19 et 20 »), selon l’intitulé de la décision.

L’article 19 porte sur les Clauses contractuelles types et dispose :

  1. Chaque Partie encourage, selon qu’il convient, l’élaboration, la mise à jour et l’utilisation de clauses contractuelles types sectorielles et intersectorielles pour les conditions convenues d’un commun accord.
  2. La Conférence des Parties siégeant en tant que réunion des Parties au présent Protocole examine périodiquement l’utilisation de clauses contractuelles types sectorielles et intersectorielles.

L’article 20 porte sur les Codes de conduite, lignes directrices et bonnes pratiques et/ou normes :

  1. Chaque Partie encourage, selon qu’il convient, l’élaboration, la mise à jour et l’utilisation de codes de conduite volontaires, de lignes directrices et bonnes pratiques et/ou normes relatifs à l’accès et au partage des avantages.
  2. La Conférence des Parties siégeant en tant que réunion des Parties au présent Protocole examine périodiquement l’utilisation de codes de conduite volontaires, de lignes directrices et bonnes pratiques et/ou normes et envisage l’adoption de codes de conduite, lignes directrices et bonnes pratiques et/ou normes spécifiques.

Ces outils encadrent mais confortent les démarches volontaires des entreprises. Les Etats devraient réfléchir à un cadre juridique plus contraignant, sinon pour eux-mêmes, mais pour les entreprises.

2 – La responsabilité sociétale des entreprises pharmaceutiques

Il semble que beaucoup d’entreprises soient prêtes à envisager des dispositions spécifiques pour que les versions génériques de leurs médicaments puissent être produites dans les pays pauvres. Le défi est de passer de l’action humanitaire à l’obligation juridique.

2a – Les actions humanitaires des entreprises

Actuellement, les entreprises pharmaceutiques mènent des actions dans les PED qui s’apparentent à des actions humanitaires même si elles se font au titre du protocole de Nagoya en rémunération des ressources biologiques.

(« Derrière toutes ces campagnes de bioprospection et ces efforts de recherche, les plantes miracles ont-elles engendré les retombées tant espérées dans leurs contrées d’origine ? A ce sujet, certains, comme le laboratoire Pierre Fabre ou l’ICSN, se targuent en tout cas d’avoir anticipé le protocole de Nagoya. Le premier a notamment contribué à la reconstruction de la faculté de pharmacie du Cambodge, du Laos et du Togo, d’après Bruno David, et « apporte un complément de revenu à quelque 3 000 familles grâce à la cueillette de la pervenche dans le sud de Madagascar ». Le second a passé des accords « au plus haut niveau » avec les organismes de recherche des pays fournisseurs, et troque des plantes contre des formations d’étudiants et des collaborations scientifiques. « Tout est prévu en cas de retombées de brevet », affirme Marc Litaudon.

Dans de rares cas, la bioprospection a même valu quelques retombées sonnantes et trébuchantes. L’exemple le plus marquant reste le contrat passé en 1991 entre le laboratoire Merck et l’Institut national de la biodiversité du Costa Rica : un million de dollars par an en échange de la fourniture de milliers d’échantillons biologiques, selon une publication de l’IRD (Les marchés de la biodiversité, 2008). Ce qui lui a valu d’être accusé par des ONG de vendre à bas prix la biodiversité costaricaine – malgré l’absence de résultats pour Merck », de la plante au médicament, http://www.lemonde.fr/planete/visuel/2014/10/11, consulté le 16 mars 2016).

Les sites internet de Sanofi ou Pfizer montrent l’implication de ces entreprises dans des projets philanthropiques (et assumés comme tels par Pfizer) visant l’accès aux médicaments.

« Sanofi a créé un département Accès au Médicament pour améliorer l’accès à la santé dans les pays les plus défavorisés.

Ce département dédié développe des solutions durables, basées sur des partenariats, pour promouvoir des soins de qualité et fournir des médicaments à prix préférentiels aux patients les plus démunis.

Notre intervention porte sur des domaines thérapeutiques dans lesquels Sanofi possède une expertise reconnue :   le paludisme,  la tuberculose,  les maladies tropicales négligées,  la santé mentale et l’épilepsie

Notre approche s’inscrit dans une démarche globale pour agir à plusieurs niveaux :

* concevoir des politiques de prix préférentiels dans les pays auxquels nous apportons notre soutien, pour rendre nos médicaments accessibles aux patients les plus pauvres ;

*développer des programmes d’information, d’éducation et de communication pour former les professionnels de santé, informer les communautés et éduquer les patients sur la prévention, le diagnostic et la prise en charge des maladies ;

* proposer, en partenariat avec les acteurs locaux, des solutions de proximité adaptées aux besoins des populations ;

* renforcer les efforts de recherche et développement pour fournir des médicaments adaptés aux besoins des populations et anticiper les besoins futurs. En fabriquant ces médicaments au plus près des populations, Sanofi participe au maintien des emplois et au transfert de savoir-faire dans les pays concernés », http://www.sanofi.com, consulté le 16 mars 2016.

PFIZER – Les médicaments dans les pays en voie de développement

Problème structurel

L’accès aux médicaments est limité dans le tiers monde. La raison est complexe. Des problèmes structurels profonds empêchent l’accès à différentes formes d’aide médicale. Exemples : la pauvreté, les canaux de distribution déficients, le niveau de formation insuffisant du personnel médical, des infrastructures insuffisamment développées. Les accords de collaboration sur place constituent une réponse adaptée à ces obstacles structurels.

Contribution de l’industrie pharmaceutique

Le secteur pharmaceutique contribue depuis des années à l’amélioration de l’accès aux médicaments dans les pays en voie de développement. Par exemple, le développement de médicaments contre la tuberculose à effet plus rapide et de médicaments efficaces contre la malaria, l’énorme diminution de prix pour les pays en voie de développement et la recherche intensive sur plus de quatre-vingts médicaments contre le sida. Pfizer distribue gratuitement, dans les cinquante pays les plus pauvres du monde, son médicament Diflucan® pour le traitement des infections fongiques liées au HIV/sida. Un programme comparable sera mis en place avec Celsentri®, le nouveau médicament anti-HIV de notre société.

Depuis 2000, les entreprises pharmaceutiques sont venues en aide à 539 millions de personnes dans les pays en voie de développement et contribuent à différents projets à hauteur de 4,4 milliards de dollars (US).

Pfizer consacre plus de 3 millions d’euros par jour pour que les personnes dans les pays en voie de développement aient accès aux médicaments appropriés. Nous formons du personnel médical et mettons en place l’infrastructure médicale indispensable. Notre site internet vous donnera un aperçu de nos projets philanthropiques », http://www.pfizer.fr, consulté le 16 mars 2016).

Un élément encourageant est la récente signature d’accords de licence entre la communauté de brevets soutenue par l’Unitaid et des laboratoires pharmaceutiques.

L’Unitaid a été créée en 2006 par 5 Etats (le Brésil, le Chili, la France, la Norvège et le Royaume-Uni) et elle en compte aujourd’hui 28. Ses ressources proviennent des taxes sur les billets d’avion (mises en place notamment par le Chili, la France, Madagascar, Maurice, le Niger et la République de Corée) ou des contributions au budget ordinaire. La Norvège verse une partie de la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone provenant des transports aériens. L’Unitaid est une initiative pour l’achat groupé de médicaments et aussi pour le développement des traitements contre trois maladies (VIH, tuberculose et paludisme), notamment de traitements adaptés aux enfants. L’accès des adultes aux traitements antirétroviraux s’est amélioré au cours des quinze dernières années, mais seul un quart des enfants qui en a besoin bénéficiait en 2014 de cette thérapie (http://www.unitaid.org, consulté le 16 mars 2016).

L’Unitaid a donné son accord de principe en 2008 pour soutenir la création d’une communauté de brevets (MPP/Medicines patent pool), proposition jugée très intéressante par les entreprises et concrétisée en 2010 pour le VIH.

La communauté de brevet, qui n’avait pas encore été appliquée au secteur des médicaments, est un mécanisme dans lequel des détenteurs de brevets mettent en commun leurs brevets dans un « pool » et autorisent ceux qui en ont besoin à avoir accès à leurs brevets et à les utiliser moyennant le paiement de royalties. Les entreprises n’abandonnent pas leurs droits de propriété mais il s’agit d’une sorte de guichet unique qui facilite les démarches des producteurs de génériques qui requièrent la combinaison de plusieurs brevets (notamment pour le VIH) et qui peut avoir un impact sur le niveau des prix (la concurrence joue beaucoup plus tôt) et l’offre de traitements indispensables pour les habitants des pays en développement, à savoir les associations de médicaments récents contre le sida et les formulations adaptées aux enfants. Mais la communauté peut aussi abandonner tout ou partie de ses droits. Elle a été lancée dans le but de négocier avec les laboratoires pharmaceutiques des licences volontaires afin de favoriser la recherche et l’accès aux traitements génériques. Contrairement aux licences obligatoires, les licences volontaires relèvent de la bonne volonté des laboratoires, en dehors des flexibilités des accords de l’Organisation mondiale du commerce.

Cette initiative a déjà obtenu des résultats. Plusieurs accords de licences ont été conclus pour le VIH et au-delà, les laboratoires entrant dans le pool pour certains médicaments (licences du MPP, http://www.medicinespatentpool.org/licences-du-pool/?lang=fr).

Après l’extension de la communauté de brevets à l’hépatite C et à la tuberculose, une nouvelle étape est franchie avec l’accord de licence sans redevance pour l’hépatite C avec le laboratoire biopharmaceutique Bristol-Myers-Squibb (qui développe la marque UPSA).

« Santé – Signature d’une licence par la communauté de brevets contre l’hépatite C (23 novembre 2015)

Nous saluons l’accord de licence sans redevance qui vient d’être signé entre la communauté de brevets mise en place par UNITAID et le laboratoire pharmaceutique Bristol-Myers Squibb. Le daclastavir, antiviral efficace dans le traitement de l’hépatite C, pourra ainsi être produit comme médicament générique dans 112 pays à faibles et moyens revenus où résident près de deux tiers des patients vivant avec la maladie. UNITAID, dont la France est le premier bailleur, a créé en 2010 une communauté de brevets pour faire baisser le prix des traitements du VIH et faciliter la mise au point de médicaments adaptés grâce à des licences volontaires et au partage de brevets. Moins de trois semaines après la décision d’UNITAID d’utiliser aussi la communauté de brevets pour la lutte contre l’hépatite C et la tuberculose, cet accord constitue une avancée majeure pour mieux venir en aide aux malades sur tous les continents, http://www.diplomatie.gouv.fr, consulté le 16 mars 2016).

«Bristol-Myers-Squibb. Responsabilité sociétale. Dans un monde où les inégalités d’accès aux soins demeurent, notre engagement prend des formes multiples : envoi gratuit de médicaments en situation d’urgence par le biais de l’Association Tulipe, politique de cessions gratuites de brevets, de réduction du prix des antirétroviraux ou encore transfert de technologies dans les pays en voie de développement à travers le programme « Global Access ». Lancé par la Fondation Bristol-Myers Squibb en 1999, « Secure The Future » a été reconnu comme le plus important partenariat public-privé mis en oeuvre par une entreprise du médicament pour lutter contre le VIH/Sida en Afrique ». (Bristol-Myers-Squibb, http://www.bms.com, consulté le 16 mars 2016). « Nous fournissons des médicaments antirétroviraux à prix coûtant et facilitons le transfert de technologies aux fabricants de génériques, pour permettre au plus grand nombre de pouvoir être traités. En 2006, nous avons fourni à deux sociétés fabriquant des génériques les technologies et la formation nécessaires pour la fabrication d’un antirétroviral qui était sorti aux Etats-Unis à peine 18 mois auparavant. Nous sommes les pionniers pour avoir procédé à un transfert de technologie aussi rapidement », Marie-Astrid Mercier, en charge des programmes Global Access et Direct Import au sein de Bristol-Myers Squibb, http://www.bmsfrance.fr/nous-rejoindre, consulté le 16 mars 2016).

En réalité, les entreprises ne renoncent pas à des avantages ni ne partagent véritablement des avantages ! Les accords sont gagnant-gagnant, que la redevance de leurs droits soit faible ou nulle.

 « La MPP a été et continue d’être entièrement financée par UNITAID dans le cadre de sa stratégie pour renforcer l’accès aux médicaments anti-VIH pour ceux qui en ont le plus besoin. Les accords de licence de la MPP produisent des retours pouvant équivaloir à 20 fois les investissements d’UNITAID grâce aux économies générées pour les acheteurs mondiaux de nouvelles formulations… Un résultat gagnant-gagnant pour tous ceux qui sont impliqués : les laboratoires pharmaceutiques conservent les marchés qu’ils ont dans les pays développés, ils étendent leur accès aux marchés des pays à revenu faible ou intermédiaire qui leur auraient été autrement hors d’atteinte, et ils reçoivent une petite redevance sur les ventes. Les bailleurs de fonds financeront de meilleurs produits à moindre coût en accédant à des prix réduits et à de meilleurs produits, les producteurs de génériques étendent leurs marchés et les patients ont un accès accru à de meilleurs produits de santé, http://unitaid.org, consulté le 16 mars 2016)

La communauté de brevets et dénoncée comme une solution mal évaluée et mal cernée, et même éthiquement contestable : les licences ciblent les pays les plus pauvres qui n’ont pas l’obligation d’accorder des brevets, les producteurs de médicaments princeps n’enregistrent pas leurs médicaments dans le pays, les deux producteurs du princeps et du générique s’entendent sur des prix minimum, la licence volontaire risque d’empêcher le jeu d’une licence obligatoire. Ces stratégies sont pointées du doigt par le milieu associatif et confirmée par le Pr. Brook K. Baker, professeur de droit à la faculté de droit américaine Northeastern University School of Law et membre de son programme pour les droits humains et l’économie mondiale (également chercheur honoraire à la Faculté de droit de l’Université Kwazulu Natal, en Afrique du Sud, et analyste politique pour Health Global Aspect Project, il écrit régulièrement sur la propriété intellectuelle, le commerce et l’accès aux médicaments. (http://www.ip-watch.org/2012/03/14/interet-de-l%E2%80%99entreprise-et-choix-strategiques-les-licences-concedees-par-gilead-au-medicines-patent-pool/, consulté le 18 mars 2016)

« Entretien avec Pauline Londeix, ancienne vice-présidente d’Act Up-Paris, publié par Matthieu Brancourt le 11 septembre 2014. Le Medicines Patent Pool cerne bien le problème : les pays où il y a le plus grand nombre de brevets qui sont déposés sont les pays à revenus intermédiaires. Malheureusement, il n’y répond pas de manière adéquate puisque ces licences incluent les pays les plus pauvres, qui n’ont pas eux l’obligation d’accorder des brevets, et excluent les pays à revenus intermédiaires où il y a bien des brevets qui entravent l’accès. Une licence volontaire intégrant les pays les plus pauvres alors qu’ils n’ont pas l’obligation d’octroyer des brevets équivaudrait à permettre à un laboratoire d’obtenir des royalties dans un pays où il n’a pas de droits de propriété intellectuelle. Cela pose un problème éthique concernant le principe de souveraineté des pays (à décider ce qui est brevetable sur son territoire ou pas) qui n’est pas pris en compte ici.

On omet souvent de dire que pour qu’un générique soit disponible dans n’importe quel pays, il faut que le producteur de médicaments princeps, par exemple Gilead pour le sofosbuvir, l’enregistre et obtienne une autorisation de mise sur le marché dans le pays, car c’est le seul moyen pour un fabriquant de générique d’enregistrer le générique. Souvent, les producteurs de princeps se contentent de prétendre permettre l’accès dans un pays très pauvre, sans pour autant enregistrer leur médicament dans ce pays. C’est juste de la communication. Par exemple, une licence volontaire qui inclut un pays d’Afrique subsaharienne, n’est en aucun cas une garantie que le médicament y sera enregistré, disponible et accessible pour les personnes qui en ont besoin. Cela ne donne pas non plus d’indication sur le prix de vente du générique lorsque celui-ci est disponible dans un pays couvert par la licence volontaire. Le laboratoire de princeps et le producteur de génériques peuvent s’entendre sur un prix minimum. Car les licences volontaires ont un objectif qui est évident pour les firmes pharmaceutiques ; c’est souvent de se lier aux producteurs de génériques par des contrats bilatéraux privés, qui empêchent donc ces mêmes producteurs d’approvisionner les pays exclus, qui sont souvent les pays où les firmes pharmaceutiques princeps souhaitent réaliser le plus de profits.

Qu’en est-il précisément, dans les mécanismes que vous décrivez, de la situation des pays à revenus intermédiaires ?

Non seulement ces licences volontaires excluent les pays à revenus intermédiaires, mais en plus elles réduisent les possibilités d’approvisionnement en génériques de ces mêmes pays. Si certains pays pourront refuser d’enregistrer un brevet ou décideront d’émettre une licence obligatoire sur le Sovaldi par exemple, à quoi cela servira-t-il si aucun producteur de génériques n’est en mesure de leur vendre, parce qu’ils sont tous liés à Gilead dans le cadre d’une licence volontaire ? Il ne faudrait pas que le Patent Pool soit un moyen pour les Etats de se donner bonne conscience et de se détourner des questions d’accessibilité, et pour les labos de se donner une bonne image auprès de l’opinion, tout en entravant la production de génériques. Pour reprendre le titre d’un communiqué de presse des activistes thaïlandais en 2011 sur une licence volontaire de Gilead : « Le diable est dans les détails ». La stratégie de la firme peut être beaucoup plus cynique qu’elle n’y paraît ». http://www.seronet.info/article/le-probleme-du-prix-des-medicaments-dans-notre-societe-est-systemique-22-68728, consulté le 16 mars 2016).

Les Etats doivent s’impliquer, si possible avec les parties prenantes, au-delà de leur engagement financier dans Unitaid.

2b – Vers une obligation de transfert et partage des technologies

Le droit de la RSE progresse de son côté puisque des Etats adoptent des lois nationales imposant des obligations de transparence aux entreprises, obligation de rendre des comptes sur leurs pratiques dans les PED, ainsi que des lois instituant des régimes de responsabilité pénale pour les sociétés-mères (Rapport de Christophe-André Frassa sur la proposition de loi relative au devoir de vigilance des sociétés-mères et des entreprises donneuses d’ordre, n°74, Sénat, 14 octobre 2015). Dans l’UE, la directive 2014/95/UE du 22 octobre 2014 concernant la publication d’informations non financières et d’informations relatives à la diversité par certaines grandes entreprises et certains groupes est entrée en vigueur le 6 décembre 2014 et doit être transposée dans les deux ans qui suivent.

Une nouvelle étape consisterait à inscrire dans quelques lois nationales des obligations précises de transfert et partage de technologies pharmaceutiques donnant aux PED qui ne peuvent s’offrir d’autres stratégies des capacités de fabrication autonomes, notamment lors de la conclusion des contrats d’accès aux ressources génétiques, par exemple l’obligation d’y consacrer un pourcentage des droits de propriété intellectuelle sur chaque contrat (ce qui permet de ne pas remettre en cause ces droits).

Des prescriptions de ce genre poseraient problème vis-à-vis de deux accords de l’OMC. Vis-à-vis de l’accord ADPIC puisque ces mesures seraient des sortes de clauses ADPIC plus inversées, ADPIC moins, diminuant les garanties des entreprises et donc contraires à l’accord (comme l’a écrit l’UE dans le rapport susmentionné). Vis-à-vis de l’accord MIC, en cas d’investissement dans les PED. Cet accord sur les mesures relatives à l’investissement et liées au commerce, adopté dans le cadre du cycle de l’Uruguay, interdit, dans le domaine des marchandises (domaine dont relèvent les médicaments), les mesures jugées incompatibles avec l’article III (traitement national des produits importés) et avec l’article XI (interdiction des restrictions quantitatives à l’importation ou à l’exportation). Les débats ont été très vifs entre PED et PD sur la nature et le champ d’application de ces nouvelles disciplines. L’accord ne définit pas ces mesures mais donne une liste exemplative de mesures incompatibles. L’accord et sa liste restent muets sur bon nombre de mesures débattues, comme les prescriptions de résultat à l’exportation et les prescriptions de transfert de technologie ! Celles-ci s’exposent à une condamnation à l’OMC…

De plus, si seuls les Etats du sud prenaient ce genre de mesures, ils risqueraient de faire fuir les entreprises pharmaceutiques ce qui se retournerait contre l’objectif d’accès aux médicaments ! Il faudrait donc que les Pays développés prennent aussi des engagements dans leurs législations, avec le risque de contentieux à l’OMC.

On devrait alors envisager un traité international sur la recherche et développement pharmaceutique avec l’obligation pour tous les Etats parties d’obliger les entreprises à réaliser des transferts et partages de technologie. Ce traité donnerait une base juridique aux mesures nationales et serait de même valeur juridique que les accords de l’OMC.

Ce traité pourrait être conclu dans le cadre du corpus biodiversité (pour les biomédicaments) ou au sein des Nations unies (pour l’ensemble des médicaments).

Cependant, s’il était conclu hors de l’OMC, ce traité risquerait de ne pas être pertinent aux yeux de l’organe de règlement des différends de l’OMC (conformément à la jurisprudence Biotechnologies de 2006), c’est-à-dire que l’accord MIC et l’accord ADPIC risqueraient de ne pas pouvoir être interprétés à la lumière des règles de ce traité si ces règles n’étaient pas applicables entre tous les Etats parties à un différend (si elles n’étaient pas communes à ces Etats en fonction du forum choisi et du processus de ratification).

Il faudrait donc réformer l’accord ADPIC et l’accord MIC par de nouveaux protocoles d’amendement. On peut au moins envisager que ces protocoles rendent expressément possibles les mesures nationales de RSE (sans contrainte pour les Etats, dans l’esprit de régulation du droit de l’OMC), ce qui permettrait de conclure un traité compatible avec le droit de l’OMC dans lequel pourraient s’engager les Etats favorables au partage des technologies.

Ceci reviendrait à déverrouiller l’OMC pour développer, dans « l’esprit de Rio », le principe des responsabilités communes mais différenciées appliqué au droit fondamental à la santé : des responsabilités communes de (presque) tous les Etats, des responsabilités différenciées en faveur des PED, des responsabilités spéciales des entreprises pharmaceutiques. Avec ce principe, on passe à une nouvelle dimension des droits humains ; ce principe appelle à concevoir un nouveau droit de synthèse, droit de troisième génération, un droit de l’humanité à la sécurité sanitaire mondiale.

 

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